Dioxines et furannes
Description
Les polychlorodibenzodioxines (PCDD) et polychlorodibenzofurannes (PCDF) sont des composés organiques formés de 2 noyaux benzéniques auxquels sont greffés un certain nombre d'atomes de chlore. La substitution des atomes d'hydrogène par des atomes de chlore résulte en la formation de 210 composés différents (congénères).
Nombre d’atomes de chlore | Nombre de congénères PCDD | Nombre de congénères PCDF |
---|---|---|
1 (Mono-) | 2 | 4 |
2 (Di-) | 10 | 16 |
3 (Tri-) | 14 | 28 |
4 (Tétra-) | 22 | 38 |
5 (Penta-) | 14 | 28 |
6 (Hexa-) | 10 | 16 |
7 (Hepta-) | 2 | 4 |
8 (Octa-) | 1 | 1 |
Total | 75 | 135 |
Dioxines | Furannes |
75 PCDD | 135 PCDF |
Parmi ceux-ci, tous ne sont pas toxiques, il faut au moins des atomes de chlore en positions 2, 3, 7 et 8, le congénère le plus toxique étant le 2,3,7,8-TCDD. On a donné aux autres congénères une potentialité toxique, ce qui conduit à parler d'équivalent toxique (TEQ).
TEQ = (congénèrei * TEQi)
Positions substituées
|
Nom de la molécule correspondante | Facteur d’équivalent toxique défini par A.G.W. du 03/12/1998 |
---|---|---|
2,3,7,8 | Tétrachlorodibenzodioxine (TCDD) | 1 |
1,2,3,7,8 | Pentachlorodibenzodioxine (PeCDD) | 0.5 |
1,2,3,4,7,8 | Hexachlorodibenzodioxine (HxCDD) | 0.1 |
1,2,3,7,8,9 | Hexachlorodibenzodioxine (HxCDD) | 0.1 |
1,2,3,6,7,8 | Hexachlorodibenzodioxine (HxCDD) | 0.1 |
1,2,3,4,6,7,8 | Heptachlorodibenzodioxine (HpCDD) | 0.01 |
1,2,3,4,6,7,8,9 | Octachlorodibenzodioxine (OCDD) | 0.0001 |
2,3,7,8 | Tétrachlorodibenzofuranne (TCDF) | 0.1 |
2,3,4,7,8 | Pentachlorodibenzofuranne (PeCDF) | 0.5 |
1,2,3,7,8 | Pentachlorodibenzofuranne (PeCDF) | 0.05 |
1,2,3,4,7,8 | Hexachlorodibenzofuranne (HxCDF) | 0.1 |
1,2,3,7,8,9 | Hexachlorodibenzofuranne (HxCDF) | 0.1 |
1,2,3,6,7,8 | Hexachlorodibenzofuranne (HxCDF) | 0.1 |
2,3,4,6,7,8 | Hexachlorodibenzofuranne (HxCDF) | 0.1 |
1,2,3,4,6,7,8 | Heptachlorodibenzofuranne (HpCDF) | 0.01 |
1,2,3,4,7,8,9 | Heptachlorodibenzofuranne (HpCDF) | 0.01 |
1,2,3,4,6,7,8,9 | Octachlorodibenzofuranne (OCDF) | 0.001 |
Origines
Ces substances sont générées par la combustion, à basse température (200 à 600 °C) de n'importe quelle matière contenant du chlore (déchets ménagers, bois, essence). Elles proviennent également de la fabrication de produits contenant du chlore : herbicides, produits de blanchiment du papier, ...
Suivant les études réalisées ces dernières années, les principaux pollueurs sont la métallurgie non ferreuse, les incinérateurs de déchets hospitaliers, les installations de chauffage des bâtiments et les incinérateurs de déchets ménagers. Vu les contraintes environnementales imposées à ces derniers, leurs émissions ont baissé de plus de 50 % ces dix dernières années et devraient devenir négligeables (moins de 1 % du total) à l'horizon 2001.
Pollutions générées
Elles se déposent sur les végétaux (sans y pénétrer), notamment ceux qui sont consommés par les animaux et les êtres humains. Environ 90 à 95 % des dioxines ingérées par l'homme proviennent de l'alimentation. Les dioxines se fixent surtout dans les graisses animales. Elles se retrouveront donc en plus forte proportion dans des éléments riches en graisses de ce type : le lait et les produits laitiers, les viandes et le poisson.
Effets sur la santé
Les dioxines sont des poisons cumulatifs dotés de propriétés immunosuppressives, neurotoxiques, hépatotoxiques, cancérigènes et pouvant entraîner des lésions cutanées (chloracné) et des troubles endocriniens et du système reproducteur. Ces propriétés toxiques ont été démontrées dans de nombreuses études effectuées chez l'animal (rat, souris, singe,..), chez des travailleurs exposés professionnellement dans l'industrie des pesticides et chez des victimes d'accidents industriels (Seveso). Tous ces effets ont été observés à des niveaux d'exposition au moins 10 fois supérieurs à ceux que l'on rencontre actuellement au niveau de la population générale. A la suite de ces études, la dioxine la plus toxique (TCDD ou dioxine de Seveso) a été classée comme cancérogène pour l'homme par l'Agence Internationale de Recherche sur le Cancer.
Au niveau environnemental, hormis les accidents industriels majeurs de type Seveso ou Yusho, les seuls effets des dioxines décrits à ce jour sont des troubles neurologiques ou hormonaux liés à une exposition in utero. Il s'agit cependant d'effets infracliniques dont la signification au niveau individuel et la causalité en relation avec les dioxines sont encore incertaines. Dans l'incertitude et en application du principe de précaution, la plupart des organisations responsables de la santé publique ont décidé d'imposer des normes très sévères pour une réduction maximale de l'exposition humaine aux dioxines.
Puisque les dioxines sont des toxiques cumulatifs non génotoxiques (c'est à dire n'endommageant pas l'ADN), les niveaux acceptables d'exposition sont établis en se référant au concept de la charge corporelle, c'est-à-dire à la quantité de dioxines stockées dans les graisses. C'est sur cette base que l'Organisation Mondiale de la Santé a déterminé une dose journalière acceptable de 1 à 4 pg TEQ par kg de poids corporel (la valeur de 1 correspondant à l'objectif à atteindre et celle de 4 au maximum tolérable. En Belgique, le Conseil Supérieur d'Hygiène a ramené le maximum tolérable à la valeur de 2 pg TEQ/kg. Les normes actuellement imposées aux denrées alimentaires (lait, matières végétales ou minérales,..) et aux émissions des incinérateurs visent a ramener notre ingestion quotidienne de dioxines à moins de 1 pg TEQ/kg (on estime qu'elle est actuellement de l'ordre de 1 à 2 pg TEQ/kg dans l'Union européenne).
L'enquête épidémiologique effectuée récemment en Région wallonne a confirmé que l'exposition aux dioxines au voisinage des incinérateurs de déchets ménagers est uniquement liée à la consommation des produits locaux et donc beaucoup plus probable en milieu rural que urbain. A partir de cette étude portant sur des incinérateurs ayant émis de grandes quantités de dioxines autrefois en regard de la norme actuelle, il a été possible de déterminer que la norme d'émission imposée aux incinérateurs de déchets ménagers (0.1 ng TEQ/Nm3) offre une marge de sécurité de 50 à 100 fois par rapport au risque de surexposition des riverains consommant des produits locaux. En d'autres termes, ce n'est que lorsque les émissions dépassent régulièrement la valeur de 5 ng TEQ/Nm3, que ces riverains encourent à long terme le risque de voir leur charge corporelle en dioxines augmenter. Cette marge de sécurité se justifie cependant par la nécessité de réduire au maximum aussi les émissions des dioxines les plus chlorées (ex. OCDD). Ces dernières sont en effet les plus persistantes dans l'environnement mais en raison de leur très faible toxicité, leurs émissions ne sont pratiquement pas prises en compte dans les normes actuelles.
Professeur Alfred Bernard
Quelques précautions
De même, pour ne pas contribuer à la pollution par les dioxines, il faut éviter les feux de jardin qui en sont une source non négligeable. L'élimination par collecte sélective et autres parcs à conteneurs est nettement préférable. Une partie de ces déchets sera alors brûlée dans de bonnes conditions par des installations équipées d'un système d'épuration des fumées.