Désinfection domestique
L'utilisation de désinfectants dans nos foyers est souvent guidée par des habitudes culturelles, des influences sociales ou la peur des maladies. Cependant, la désinfection domestique n'est nécessaire que dans des situations spécifiques et limitées. En général, des produits d'entretien simples suffisent à maintenir l'hygiène et la qualité de vie dans votre logement.
Les bactéries : Amies ou ennemies ?
Les bactéries sont omniprésentes et essentielles à notre santé. On estime que le corps abrite une population impressionnante de milliards de bactéries1. Ces bactéries se retrouvent sur la peau, dans le nez, la bouche, sur les yeux ou encore, pour la plupart, dans les intestins. A cela, s’ajoutent les milliards de bactéries présentes dans notre environnement quotidien auxquelles nous sommes exposés en permanence.
Seulement 3% des bactéries sont potentiellement dangereuses, et notre système immunitaire est généralement capable de les combattre efficacement. Les bonnes bactéries empêchent les mauvaises de se développer, et leur absence peut même être nuisible à notre santé. L'absence de bactéries n'est donc ni souhaitable, ni souhaitée car leur présence est directement en relation avec le bon fonctionnement de notre organisme.
Définition de la désinfection
La désinfection vise à éliminer ou inactiver les micro-organismes sur des surfaces contaminées. Dans le logement, on utilise principalement des substances chimiques pour désinfecter. Les désinfectants font partie de la famille des substances biocides, substances chimiques qui ont la particularité de détruire la vie, et ils sont classés selon les organismes qu'ils ciblent : bactéricides, virucides, fongicides, rodonticides, etc.
Cependant, il ne faut pas confondre désinfection et nettoyage. Pour ce dernier, on utilise des produits d’entretien contenant, entre autres, des savons ou détergents, qu’on appelle encore agents de surface ou agents tensio-actifs. Ils sont destinés à réagir avec les graisses et à éliminer les salissures.
Risques pour la santé liés aux désinfectants
L'utilisation de désinfectants peut provoquer des irritations, des maladies respiratoires (asthme, …) et des réactions allergiques non seulement chez l’utilisateur, mais également chez les personnes partageant le même logement, comme décrit ci-dessous. Il est donc crucial de manipuler ces produits avec précaution.
Les petits enfants sont particulièrement vulnérables. En effet, leur organisme est encore en développement. Leur peau n’est pas à maturité et leur système respiratoire n’est pas encore complètement opérationnel comme celui d’un adulte.
Les femmes enceintes, pour la vie qu’elles portent, sont aussi un public à risque, sans oublier les personnes âgées dont les systèmes de défense sont émoussés ou encore les personnes présentant un problème de santé (personnes allergiques, immunodéprimées…).
Chez l’adulte, les risques augmentent principalement après de mauvaises manipulations ou d’un manque de prudence : manipulation de produits corrosifs ou dangereux sans gants, ni lunettes, utilisation d’un produit sans lire les précautions d’emploi, dégagement de vapeurs irritantes en mélangeant des produits (comme de l’eau de Javel avec un produit acide) en sont quelques exemples. Chez l’enfant, il s’agit surtout d’ingestions accidentelles ou de projection dans l’œil ou sur la peau.
Les risques pour la santé, suite à l’exposition aux désinfectants chimiques et aux produits d’entretien en général, sont les suivants :
Pour le système respiratoire
L'usage des désinfectants est susceptible de provoquer des irritations respiratoires. Il augmente aussi le risque de développer de l’asthme, avec ou sans période de latence (délai entre l’exposition au produit et la déclaration de la maladie), voire de déclencher directement des crises d’asthme chez les personnes à risque.
L'utilisation de ces produits peut aussi renforcer les symptômes liés aux syndromes de détresse respiratoire et aux symptômes de bronchopneumopathie chronique obstructive.
Pour la peau et les yeux
Les désinfectants sont susceptibles de provoquer des irritations et des réactions de type allergique au niveau de la peau (eczéma) et des yeux (conjonctivite).
Pour le système cardiovasculaire
Des études montrent que l’utilisation à long terme de produits ménagers sous forme de spray ou aérosols et de parfums, était associée à̀ une augmentation des problèmes cardiovasculaires tels que l’infarctus du myocarde et le développement d’une hypertension artérielle. Les sprays ou aérosols dispersent des microgouttelettes contenant la substance active, dont une partie est susceptible de rester en suspension dans l'air, d’être inhalées ou de se coller aux poussières du logement. Ces poussières peuvent, à leur tour, être remises en suspension et être inhalées.
Risques endocriniens/métaboliques
Aucune relation de cause à effet entre une exposition domestique aux désinfectants et l’apparition d’une maladie due à une modification hormonale n’a encore été démontrée objectivement. Il en est de même pour le risque de développer des cancers. Cependant, comme ces pathologies sont souvent multifactorielles et que la mise en évidence du risque endocrinien prend du temps, il convient de rester attentif quant à l’avancée de la recherche scientifique en la matière.
Résistance des bactéries
L'usage des désinfectants peut aussi induire des processus de résistance des bactéries aux désinfectants, compliquant la tâche des personnes qui ont réellement besoin de lutter contre les bactéries pathogènes, notamment dans les milieux médicalisés.
Impact sur la qualité de l'air intérieur
Les désinfectants peuvent libérer des substances chimiques qui dégradent la qualité de l'air intérieur. Il est recommandé de limiter leur usage et de privilégier des produits d'entretien simples pour réduire l'exposition aux polluants. La désinfection domestique, par la dispersion de solvants ou de substances agressives comme le chlore, impacte directement la qualité de l'air intérieur.
Une façon d’agir est de limiter ou d’éliminer les produits qui s’avèreraient inutiles ou peu utiles. L’usage des produits désinfectants rentre dans cette perspective si l’on considère que leur usage peut se réduire à des actions ponctuelles et particulières.
Pour l'hygiène du logement
Non, la désinfection domestique n’est que rarement nécessaire. Un nettoyant multi-usage suffit généralement à maintenir l'hygiène. Les désinfectants ne sont recommandés que dans des situations spécifiques, comme une crise sanitaire ou la présence de moisissures. En général, le nettoyage avec des détergents permet déjà l’élimination d’une part importante des populations de bactéries présentes sur les surfaces nettoyées. Si l’on compare le nettoyage des mains au savon ou avec un désinfectant, on note que l’usage du savon (détergent, tensio-actif) et le rinçage à l’eau éliminent déjà plus de 90% des bactéries présentes sur les mains.
L’autre avantage à limiter son utilisation des désinfectants est d’ordre financier. Ne pas les acheter, c’est faire des économies en plus de réduire le risque domestique de vous exposer à des produits dont l'usage et la fabrication représente une menace inutile pour la santé et pour l'environnement.
La bonne question à se poser pour savoir si un désinfectant est à utiliser est : Qui l’affirme et pourquoi ?
En tout état de cause, il convient toujours de se référer :
- à votre médecin généraliste ;
- à votre pharmacien.
- aux recommandations des instances sanitaires officielles du pays.
Cela réduit drastiquement les situations où l'usage d'un désinfectant est nécessaire.
On peut néanmoins citer quelques exceptions où l’usage d’un désinfectant serait recommandé :
- Une situation médicale particulière dans le logement ou la famille.
- Une situation de crise sanitaire exceptionnelle comme celle du COVID-19.
Pour en savoir plus en matière de nettoyage et de désinfection domestique, nous vous invitons à consulter les recommandations du Service Public Fédéral de la santé ; et la liste des désinfectants autorisés par le Service Public Fédéral. - Un contact avec un liquide corporel ou des excréments humains ou d’animaux, bien que si aucune pathologie n’est déclarée, un nettoyage avec un détergent (savon) est suffisant.
- La présence de moisissures.
Cependant, concernant les moisissures, l'expérience pratique montre que dans de nombreuses situations, le recours à un détergent ou du vinaigre solutionne déjà le problème. Il est parfois conseillé d'encapsuler ensuite la zone avec une couche de peinture. Rappelons que la présence de moisissures est directement liée à la présence d'eau sur le support. Il convient donc toujours de comprendre la raison de la présence des moisissures (d’où vient l’humidité ?) et de supprimer leur source car dans le cas contraire, elles réapparaitront rapidement. Plus d’infos sur notre page consacrée aux polluants de l'air intérieur.
Les produits d'entretien à utiliser
Optez pour des produits simples, sans parfums ni colorants, et respectez les dosages et recommandations d’usage. Limitez le nombre de produits utilisés et évitez les mélanges dangereux. Un savon noir ou un nettoyant multi-usage convient pour la plupart des surfaces, et un anticalcaire pour les dépôts de calcaire.
Il est important de lire attentivement les étiquettes et la notice éventuelle avant l’utilisation. L’étiquette offre beaucoup d’informations : pictogrammes de danger, mention de danger et conseils de prudence à l'utilisation, encore faut-il prendre le temps de les décrypter, de s’informer et de les comprendre.
Consultez sans modération le site : « Lire avant utilisation. Cela peut sauver une vie ».
Voici quelques conseils pour prévenir les accidents :
- Décryptez et lisez l’étiquette avant d’utiliser un produit.
- Respectez scrupuleusement le mode d’emploi.
- Rangez les produits les plus dangereux hors de portée des enfants (armoire idéalement ventilée, fermée à clé ou en hauteur).
- Ne laissez pas trainer un fond de détergent ou d’eau de javel dans une tasse.
- Prévenez les autres utilisateurs lorsque vous détartrez la bouilloire ou la machine à café.
- Conservez les produits dans leur emballage d’origine, les produits transvasés causent encore trop d’accidents.
N’oubliez pas de bichonner les torchons, éponges et autres lavettes que vous utilisez pour le nettoyage. En effet, si la maison doit être propre, il ne faut pas y apporter des saletés supplémentaires en oubliant de nettoyer les outils. Par exemple, une nuit passée dans du vinaigre aidera une éponge à dissoudre les graisses et à enlever les mauvaises odeurs.
Vous pouvez aussi décider de réaliser vos produits d’entretien vous-mêmes. C’est économique et à la portée de tous. Vous trouverez des recettes dans la brochure Remue–ménage. L'entretien au naturel : sain, facile et pas cher. | écoconso
Impact environnemental des désinfectants
L’usage de produits désinfectants a aussi un impact sur la qualité de notre environnement. Il convient donc, à l’extérieur comme à l’intérieur, de respecter les notices d’utilisation et de gérer avec soin l’élimination des emballages et des contenants.
Les désinfectants ne font pas bon ménage avec les fosses septiques et microstations d'épuration individuelles. Ces produits détruisent la flore bactérienne dont le rôle est justement de réduire et de minéraliser la masse organique qui doit être traitée. Les désinfectants et les antibactériens à base de chlore sont concerné par ce problème, ainsi que les pesticides, les désherbants et les produits contenant des métaux lourds. Le vinaigre d'alcool, par contre, n'endommage pas la flore bactérienne de votre microstation d'épuration.
Les flacons et emballages qui ont contenu des produits catégorisés comme dangereux ne peuvent pas être directement éliminés dans le sac dédié aux PMC car ils sont catégorisés comme « Petits déchets spéciaux du ménage ». Vous devrez alors les déposer dans la zone réservée à ces déchets spéciaux dans votre parc à conteneurs ou recyparc.
Quels sont les indices pour différencier les flacons qui vont dans le sac PMC de ceux qui vont au parc à conteneurs ou recyparc ?
Vont au Parc à conteneurs, recyparc :
- Les flacons non vides présentant un des symboles (pictogrammes) de danger
- Les flacons bien vidés ;
- Les flacons avec un bouchon présentant une sécurité enfant ;
- Les flacons avec les symboles (pictogrammes) de danger à tête de mort ou CMR ;
- Les flacons ayant contenu des pesticides, herbicides, de l'huile de moteur ou du silicone.
En attendant, pour les conserver en toute sécurité, réservez chez vous un emplacement sec et aéré, fermé, hors de la portée des enfants et des animaux. On trouve dans le commerce, des bacs en plastique recyclé prévus pour cet usage. Conservez les déchets chimiques dans leur emballage d'origine ou dans un emballage étanche et étiqueté afin de faciliter leur identification et leur traitement.
Attention à ne jamais mélanger entre eux les produits contenus dans les flacons étiquetés déchets spéciaux. Cela peut occasionner des réactions chimiques explosives ou toxiques. Les déchets spéciaux seront traités par des entreprises spécialisées selon des règles de sécurité et environnementales strictes.
Ces conditions sont aussi essentielles pour assurer la sécurité des travailleurs et pour l'environnement.
Pour plus d’infos, renseignez-vous auprès de votre intercommunale de gestion des déchets.
- Voir la liste sur la page de la Wallonie : « Moins de déchets »
- Par exemple, Infographie sur le site du Bureau économique de la Province de Namur :
Ressources et conseils
- Centre Antipoisons de Belgique : 070 245 245 - site web
- Médecin généraliste et pharmacien pour des conseils sur l'utilisation des désinfectants
- En Belgique, les biocides sont réglementés par le Service Public Fédéral (Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et environnement) qui publie et met à jour une liste des biocides autorisés en Belgique :
- Commission européenne
- Comprendre la Directive « Biocides » : agence européenne des substances chimiques
- Espace Environnement asbl pour des informations sur la pollution intérieure : 071 300 300 - sante-habitat@espace-environnement.be - site web Santé Habitat
- écoconso pour des conseils sur une consommation durable : 081 730 730 - info@ecoconso.be - page web
- Faire ses propres produits d’entretien : vous trouverez des recettes dans la brochure Remue-ménage
1 Sender R, Fuchs S, Milo R. Revised Estimates for the Number of Human and Bacteria Cells in the Body. PLoS Biol. 2016 Aug 19;14(8):e1002533. doi: 10.1371/journal.pbio.1002533