SANISOL
La pratique du jardinage est en recrudescence et elle démontre plusieurs bienfaits physiques, sociaux et psychiques. Cependant, l’autoproduction en jardins collectifs ou privatifs se heurte aux interrogations grandissantes quant aux risques sanitaires liés à la pollution en métaux (arsenic, cadmium, mercure, plomb, zinc, etc.) relevée dans certains sols en Wallonie.
Dans ce contexte, le projet SANISOL a mobilisé des compétences pluridisciplinaires en matière d’échantillonnage et d’analyses de sols et de légumes ainsi que de biomonitoring avec prélèvements d’échantillons biologiques (cheveux, sang, urine), le tout en concertation avec les acteurs régionaux et locaux. En effet, un jardin communautaire liégeois (le Coin de Terre de Bressoux - CTB) a été activement impliqué dans le projet comme site d’échantillonnage.
Le projet SANISOL a ainsi approfondi divers aspects de la problématique de la culture sur sol contaminé.
Objets de l'étude
Premièrement, le projet a cherché à déterminer des teneurs limites en polluants dans le sol et les végétaux en vue d’assurer la qualité commerciale des productions végétales en Wallonie (volet 1). De façon complémentaire, les partenaires ont analysé l’étendue et l’origine des teneurs en polluant dans le sol sur le site de Bressoux et aux alentours (volet 2).
Par ailleurs, un diagnostic du modèle d’évaluation des risques pour la santé humaine S-Risk® et de ses conditions d’utilisation dans le cadre de la production végétale a été réalisé (volet 3).
Pour répondre aux préoccupations des jardiniers du CTB et déterminer l’imprégnation en métaux des individus, un biomonitoring ciblé pour les usagers du coin de terre de Bressoux a été mené (volet 4).
Ensuite, dans le but de fournir aux jardiniers cultivant (en vue d’une autoconsommation) sur des sols contaminés des recommandations spécifiques à leur situation, un outil informatique nommé « SANISOL » accessible via internet a été créé (volet 5).
Enfin, tout au long du projet, une attention particulière a été apportée à la communication et l’accompagnement des acteurs locaux. C’est ainsi qu’un volet spécifique a été dédié à la gestion de la communication et la réalisation d’une documentation centralisée (volet 6).
Les 6 volets du projet SANISOL sont développés dans les points ci-dessous. Tous ces travaux ont fait l’objet de nombreux délivrables, détaillant chacune des méthodes déployées et résultats obtenus. Les principaux documents sont disponibles ci-après.
Résultats de l'étude
Volet 1. Teneurs limites en polluants et essais sur le jardin du site du CTB
Détermination de teneurs limites en polluants dans les sols et les végétaux en vue d’une production végétale commercialisable
Dans le cadre de la subvention SANISOL, une réflexion a été menée afin de définir des teneurs limites en polluants dans les sols et les végétaux en vue d’une production végétale commercialisable. Avant toute chose, une synthèse des informations disponibles concernant les transferts des métaux dans le système sols-plantes cultivé a été réalisée. Celle-ci traite du comportement des Eléments Traces Métalliques (ETM)dans le sol ainsi que pendant les transferts sol-plante. Une base de données a été constituée. Celle-ci a participé à la création de l’outil de prédiction des teneurs en contaminants dans différentes catégories de fruits et légumes à partir des propriétés des sols.
Une fois le modèle de prédiction établi, une réflexion a été menée concernant les valeurs seuils de polluants dans les végétaux et les sols capables d’accueillir une production végétale alimentaire. Ces réflexions sont enrichies dans le deuxième volet du projet SANISOL, pour l'Arsenic (As), le Cadmium (Cd) et le Plomb (Pb). Ensuite, de nouvelles données ont été acquises lors de différentes campagnes de prélèvement.
Ces données ont été restituées aux jardiniers du Coin de Terre de Bressoux. Enfin, des notes techniques tel que des FAQ’s, des recommandations à l’intention des jardiniers du CTB ou des utilisateurs de l’outil SANISOL et des propositions de recommandations ont été rédigées.
Mise en place d’essais sur le jardin du site du CTB
Dans le cadre du projet SANISOL, différentes cultures de légumes ont été implantées sur le site de la ligue du Coin de Terre de Bressoux (CTB), selon différentes modalités de semis et plantations : en intérieur ou en extérieur, sous serre, sac ou sous tapis chauffant. Après les semis, des opérations de rempotage et repiquage ont été effectuées entre avril et novembre 2019.
Les différentes techniques de culture peuvent être catégorisées en trois groupes :
- culture en pleine terre,
- culture en pot avec un substrat composé de terreau et
- culture sur des bottes de paille.
Seuls les plants de tomates, aubergines et poivrons ont été placés sous serre étant donné le besoin de chaleur plus élevé pour leur développement.
Les résultats ont montré qu’il est difficile de déterminer à ce stade quelle technique culturale entre la culture en pot ou sur botte de paille est préférable. En effet, une grande variabilité est observée entre les types de légumes. Les végétaux ne dépassent pas les taux légaux ou recommandés même lorsqu’ils sont cultivés en pleine terre sur le coin de terre de Bressoux. Néanmoins, même si les végétaux ne sont pas hors taux légaux, des précautions doivent être prises lors de la période d’exposition et de manipulation des sols et végétaux.
En ce qui concerne les catégories de légumes, les herbes aromatiques et la salade semblent accumuler d’avantage les ETM que les autres catégories exceptées pour le molybdène où les haricots présentent une teneur plus élevée.
La caractérisation de certains intrants a également été effectuée. Il en ressort que les engrais utilisés apportent une charge supplémentaire en ETM. Une attention particulière doit être portée quant à la qualité des engrais et intrants apportés par l’utilisateur lorsqu’il jardine afin de limiter l’apport de contaminants.
Délivrables
Volet 2. Etendue et origine des polluants à Bressoux et alentours
Investigation de la qualité des sols aux alentours de Bressoux en lien avec la réflexion sur la détermination des concentrations de fond
Afin de déterminer si les teneurs en métaux du potager collectif du CTB peuvent être considérées comme des concentrations de fond au sens du Décret wallon relatif à la gestion et à l'assainissement des sols (M.B. 22.03.2018), les procédures du guide intitulé « Aide à l'expert pour la proposition de concentrations de fond dans le cadre du Décret wallon relatif à la gestion et à l'assainissement des sols » ont été appliquées.
Ce travail conclu que les teneurs en métaux des sols du potager collectif du CTB peuvent être considérées comme des concentrations de fond. Cette expérience a permis de formuler des suggestions d'amélioration des procédures du guide d'aide à l'expert.
Les sols du potager collectif du CTB ainsi qu'une centaine de sols de Bressoux ont ensuite fait l'objet d'une campagne d'échantillonnage et d'analyse afin de préciser les cartes régionales de concentrations de fond autour du CTB.
Des cartes de concentrations de fond ont été produites pour l'ensemble des métaux étudiés dans SANISOL (As, Cd, Cr, Cu, Hg, Mn, Mo, Ni, Pb et Zn) ainsi que pour l'étain.
Les cartes confirment que le potager collectif du CTB est situé dans un contexte géographique de teneurs élevées en métaux et suggèrent que ce contexte de teneurs élevées dépasse le périmètre investigué dans ce travail en direction du sud-ouest.
Par ailleurs, l'opportunité du remplacement d'analyse de sol par des mesures que l'on peut obtenir par spectrométrie XRF (« X-ray fluorescence ») pour alimenter l'outil SANISOL a été étudiée par l’UCLouvain. En particulier, plusieurs aspects ont été examinés : la justesse de la mesure (capacité de prédiction d'un résultat de mesure obtenu par extraction à l'eau régale), la fidélité de la mesure (erreur aléatoire de mesure par pXRF) et la fiabilité de l'outil (biais et dérives temporelles).
Synthèse des données sur les activités historiques au droit des « Terrains du Bouhay » et aux alentours
Ces analyses ont été complétées par le bilan des activités historiques aux alentours immédiats et éloignés des jardins du CTB en vue d’identifier l’origine des polluants retrouvés dans les sols.
Ce travail a permis de compiler les données historiques propices à l’accomplissement de la détermination des concentrations de fond et de l’amélioration des recommandations données par l’outil SANISOL, et relatives aux activités et faits survenus au droit du site dit « Terrains du Bouhay » (code SPAQυE Lg4402-015), ainsi qu’à sa périphérie dans un rayon d’un kilomètre. Cette action comporte deux volets :
Premier volet
Il vise à synthétiser et à soumettre à un examen critique diverses informations récentes, communiquées à la SPAQυE par le SPW-ARNE (Département du Sol et des Déchets, Direction de la Protection des Sols), dans le cadre du présent projet. Au final, ces informations constituent un addendum au bilan historique du site réalisé par la SPAQυE en septembre 2017;
Second volet
Ce volet consiste à identifier les dénominations, natures, époques des activités et localisations aussi précises que faire se peut d’un maximum d’anciens sites industriels, dans un rayon d’un kilomètre autour du site. Les informations récoltées au départ des sources documentaires connues, accessibles et exploitables à ce jour figurent sur des cartes commentées.
Délivrables
Volet 3. Diagnostic du modèle d’évaluation S-Risk® et de ses conditions d’utilisation
Dans le cadre de la subvention SANISOL, une analyse critique du modèle S-Risk© WAL a été réalisée. Ce logiciel est l’outil d’évaluation des risques pour la santé humaine recommandé par l’Administration wallonne dans le cadre de la gestion des sites et sols pollués. L’objectif de la recherche était d’évaluer la pertinence de l’utilisation du modèle S-Risk© WAL pour l’estimation d’une part de la qualité de la production végétale et d’autre part de l’exposition des jardiniers cultivant et consommant leur production provenant de sols contaminés. Les paramètres du modèle les plus influents ont ensuite été adaptés afin de limiter les incertitudes et de prendre en compte les connaissances les plus récentes, tant pour la production des végétaux que pour leur consommation, spécifiques à la population wallonne.
La mise à jour de certains paramètres d’exposition sensibles pour l’évaluation des risques pour la santé humaine dans le cadre de la culture potagère a ainsi été proposée, notamment : les quantités ingérées de terre et de poussières, les biodisponibilités de l’arsenic et du plomb dans le sol pour l’homme, les quantités consommées de fruits et de légumes, les fractions de fruits et de légumes autoproduites et consommées.
De même, la prise en compte d’une base de données de ‘plein-champ’ nombreuses et variées obtenues en Wallonie (1341 couples sol-plante pour 5 légumes courants – pomme de terre, carotte, laitue, courgette, haricot - et 590 nouvelles données concernant 60 plantes potagères) a permis de consolider les modèles de transfert sol-plante des espèces connues et de les élargir à de nouvelles espèces de plantes potagères. Ainsi, l’outil SANISOL peut estimer les teneurs en 10 métaux lourds (arsenic, cadmium, chrome, cuivre, manganèse, mercure, molybdène, nickel, plomb et zinc) dans 47 plantes potagères (légumes, fruits, herbes aromatiques).
Les travaux se sont poursuivis par la conception d’un logigramme décisionnel pour la délivrance des recommandations dans l’outil SANISOL. Cet outil fonctionne selon 2 parties distinctes réalisées en parallèle : une évaluation détaillée des risques pour la santé humaine selon le profil (fruits et légumes cultivés, catégorie d’âge, part des légumes du potager dans la consommation totale de légumes, présence du potager à proximité du domicile) et les analyses (sols et éventuellement plantes) renseignés par l’utilisateur, et une comparaison des teneurs en métaux dans les plantes aux (1) teneurs moyennes mesurées dans les mêmes fruits et légumes du commerce et aux (2) teneurs maximales issues du règlement (CE) No 1881/2006 de la Commission du 19 décembre 2006 portant fixation de teneurs maximales pour certains contaminants dans les denrées alimentaires (uniquement pour le cadmium et le plomb).
Des valeurs-pivots ont été établies pour aiguiller la navigation dans le logigramme et distinguer les jardins dont les sols présentent des faibles teneurs en métaux (VS* = valeur seuil étoile) ou au contraire des teneurs particulièrement élevées (VA = valeur d’attention).
Les niveaux sont fixés pour les polluants à effets à seuil à un indice de risque (IR) de 1 et pour les polluants cancérigènes génotoxiques à effets sans seuil à un excès de risque de cancer (ExCR) de 10-5, correspondant à un cas de cancer excédentaire sur 100 000 personnes par rapport aux cas de cancers qui surviendraient naturellement dans la population générale non exposée.
La prise en compte dans le modèle S-Risk© WAL comme dans l’outil SANISOL de valeurs toxicologiques de référence récentes plus strictes pour l’arsenic et le plomb (Santé Canada et EFSA respectivement) d’une part et de l’effet cumulatif du cadmium (OMS) d’autre part, conduit, à la présence de risques inacceptables théoriques pour la santé humaine pour des sols naturels (arsenic et plomb) ou au contraire à l’absence de risques inacceptables théoriques pour des concentrations dans les sols très élevées (cadmium). Face à une distorsion entre les résultats du modèle et les concentrations de fond en Wallonie, une révision des niveaux d’acceptabilité du risque admis en Wallonie a ainsi été nécessaire pour l’arsenic, le cadmium et le plomb. Une révision de leurs valeurs toxicologiques de référence ou de l’adoption d’une autre méthodologie d’évaluation des risques pour ces métaux s’avère nécessaire.
Différents niveaux de recommandations sont proposés au cas par cas selon les résultats des différentes étapes du logigramme décisionnel, dans le but de réduire l’exposition des utilisateurs aux métaux.
Un soin tout particulier a été porté à l’élaboration de recommandations spécifiques, simples et pragmatiques, visant à orienter le jardinier vers des pratiques culturales et des habitudes de consommation adaptées à la présence de métaux dans le sol de son potager et à son profil d’utilisateur.
Délivrable
Volet 4. Biomonitoring ciblé pour les usagers du Coin de Terre de Bressoux
Analyse de la pertinence d’un biomonitoring ciblé pour les usagers du Coin de Terre de Bressoux et méthodologie envisagée
Le site du Coin de Terre de Bressoux est probablement le potager collectif urbain le plus grand, le plus fréquenté et l’un des plus contaminé en métaux de Wallonie. Environ 300 familles, vivant principalement dans le quartier de Bressoux plutôt socio-économiquement défavorisé, exploitent des parcelles dont les sols ont de teneurs élevées en métaux (e.g. jusqu’à 900 mg/kg en Pb) et consomment les fruits et légumes qui y sont produits alors que plus d’un tiers d’entre eux ne sont pas conformes aux teneurs limites imposées par le règlement CE1881/2006. Les normes réglementaires relatives aux sols en Wallonie sont dépassées simultanément pour plusieurs métaux et pour la majorité voire la totalité des échantillons de sols. Des recommandations consistant en des mesures d’hygiène, en des limitations relatives aux catégories/espèces de légumes cultivées et à la fréquentation du site par les enfants, ont été formulées dès juillet 2017, puis précisées en novembre 2017. Toutefois, l’état d’imprégnation de la population était encore inconnu, alors même qu’il était nécessaire d’évaluer la pertinence des recommandations pour déterminer si elles suffisent à soustraire la population aux risques liés à la fréquentation du site et à la consommation des végétaux produits.
L’analyse présentée ici avance les éléments motivant la réalisation du biomonitoring ciblé sur les utilisateurs du CTB, ses objectifs, les biomarqueurs retenus et la méthodologie poursuivie.
Réalisation de la première campagne de biomonitoring et du biomonitoring contrôle
Durant l’été 2018, une première campagne a permis de recruter 93 volontaires (88 adultes et 5 enfants), qui avaient consommé des fruits et légumes du CTB et/ou qui fréquentaient le CTB. Ces personnes étaient invitées à donner un échantillon de sang et d’urine, à donner une mèche de cheveux et à répondre à un questionnaire. Les biomarqueurs les plus pertinents en termes d’effet sur la santé ont été mesurés. Il s’agit :
- du plomb dans le sang (PbS),
- du cadmium dans l’urine (CdU) et
- de l’arsenic spécié dans l’urine (AsspécU): As(III) et As(V) + acide monométhylarsonique (MMA) + acide diméthylarsinique (DMA).
Les résultats d’analyse ont été comparés à trois valeurs de référence : (1) des valeurs limites biologiques d’exposition, (2) des données issues d’études de biomonitoring menées en population générale et (3) des données de biomonitoring collectées dans le cadre d’études de cas (personnes exposées et non exposées à des sols contaminés). Les comparaisons ont montré une imprégnation élevée en CdU, en AsspécU et, dans une moindre mesure, en PbS retrouvées chez les 93 participants du biomonitoring, suggérant un risque non négligeable pour la fonction rénale, le cadmium et le plomb ayant comme organe cible le rein.
Suite à ces résultats, le gouvernement wallon a financé une nouvelle campagne de biomonitoring à destination des 93 volontaires de la première campagne dans le but de confirmer les résultats. Sur le mois de mars 2019, 60 personnes ont à nouveau participé au biomonitoring (55 adultes et 5 enfants). Les résultats de cette deuxième phase ont montré des tendances différentes selon les biomarqueurs. Une réduction significative des imprégnations a pu été démontrée pour le CdU, le CdS, le PbS, le PbU, le CuU et l’AsspécU. A l’inverse, aucune réduction significative n’a été mise en évidence pour le ZnU et le MoU.
Cette réduction générale des imprégnations suggère une exposition moins importante en hiver qu’en été chez les personnes liées au CTB, particulièrement pour le cadmium et le cuivre. Toutefois, pour investiguer davantage la piste du CTB comme source d’exposition et d’explication de certaines imprégnations, un biomonitoring témoin, ciblant des personnes résidant à Bressoux mais n’ayant aucun lien avec le CTB, était nécessaire.
Confrontation des données d’imprégnation (campagne 2018) aux évaluations des risques sanitaires pour la population du Coin de Terre de Bressoux
L’objectif de cette réflexion était de confronter les résultats des évaluations de risques sanitaires (ERS) aux données acquises dans le cadre du biomonitoring (mesures des imprégnations et analyses des facteurs explicatifs). Les premières ambitionnent d’estimer les doses d’exposition externes dues aux apports en métaux liés uniquement à la pratique du jardinage et à la consommation des légumes produits. Les secondes évaluent l’exposition interne (l’imprégnation) de manière globale, sans distinction entre les différentes sources environnementales possibles (tabagisme, alimentation (notamment consommation de poissons, de riz), l’exposition aux peintures et aux canalisations en Pb, etc).
L’analyse réalisée montre que le modèle SANISOL produit des ERS de l’ordre de celles réalisées précédemment (la quantification du risque par les modèles est proche). Si l’absence de risque pour les métaux tels que Cu, Zn, Mo est cohérente avec les imprégnations mesurées de l’ordre des moyennes en population générale, il est difficile d’établir si les risques liés à l’As et au Pb prédits par le(s) modèle(s) sont cohérents ou prédisent les imprégnations mesurées, élevées à très élevées dans la population d’étude. A l’inverse, pour le Cd, les imprégnations très élevées mesurées dans la population d’étude ne sont pas associées à un risque inacceptable (IR>1) pour les ERS. Pour cette raison, il a été proposé d’intégrer dans le modèle SANISOL un seuil d’acceptabilité inférieur par au moins un ordre de grandeur.
La confrontation des ERS réalisées (approches simplifiées et détaillées) aux conclusions issues de la campagne de biomonitoring conduite durant l’été 2018 est nécessaire et intéressante, mais intrinsèquement très difficile à réaliser. Etablir ce lien est encore plus difficile dès lors qu’il a été précédemment démontré que l’imprégnation de la population de Bressoux est multisource et mutifactorielle.
Réalisation du biomonitoring témoin et comparaison avec les premières campagnes de biomonitoring
Le biomonitoring Témoin a été conduit en été 2019 et avait pour objectif de déterminer si la population qui habite Bressoux mais qui ne bénéficie aucunement du CTB est moins imprégnée que la population de Bressoux qui en bénéficie. Une campagne de biomonitoring a donc été organisée avec l’objectif d’inclure des résidents de la commune de Bressoux n’ayant aucun lien avec le CTB, ni en termes de fréquentation ni en termes de consommation de fruits et légumes qui y sont produits.
Il apparait que les imprégnations en cadmium, cuivre, molybdène, plomb et zinc de la population Témoin de Bressoux sont comparables aux imprégnations retrouvées dans des études en population générale excepté pour l’arsenic spécié qui est plus élevé. En été, les imprégnations médianes en métaux de la population Témoin sont plus basses que celles de la population bénéficiaire du Coin de Terre.
Grâce aux différentes analyses menées à Bressoux, il a été montré que vivre à Bressoux n’implique pas une surimprégnation des organismes en métaux mais, par contre, le jardinage intensif conjugué à la consommation des fruits et des légumes produits localement peut conduire à des imprégnations plus élevées et potentiellement dommageables pour la santé.
Délivrables
- Rapport biomonitoring SANISOL Contrôle - correctif
- Rapport de biomonitoring SANISOL - correctif
- Confrontation des données d’imprégnation (campagne 2018) aux évaluations des risques sanitaires pour la population du Coin de Terre de Bressoux
- Réalisation du biomonitoring témoin et comparaison avec le biomonitoring SANISOL
- Brochure "Bressoux : analyse de l'exposition aux métaux lourds des habitants et recommandations"
- Rapport de biomonitoring SANISOL
- Réalisation de la première campagne de biomonitoring et du biomonitoring contrôle
- Rapport biomonitoring SANISOL Contrôle
- Analyse de la pertinence d’un biomonitoring ciblé pour les usagers du Coin de Terre de Bressoux et méthodologie envisagée
Volet 5. L’établissement d’un outil informatique pilote « SANISOL » accessible via internet
L’outil informatique SANISOL qui valorise les différents résultats de ces travaux a également été développé dans le cadre de ce projet. Il a pour objectif d’émettre des recommandations en matière de production végétale et de gestion à la parcelle sur base d’un modèle d’évaluation des risques (construit à partir d’équations de transfert sols-plantes, de valeurs toxicologiques de référence, de valeurs de bioaccessibilité spécifiques à chaque métal).
A partir des résultats d’analyses de sols et, s'ils sont disponibles, de légumes obtenus sur son terrain, le jardinier (amateur ou professionnel) pourra connaître son niveau d’exposition aux métaux lourds liée à la fréquentation du terrain et à la consommation de légumes et de fruits provenant de son potager. En cas d’exposition excessive, l’outil délivrera des recommandations pratiques.
L’outil SANISOL a été mis en ligne depuis le 6 avril 2021. Il se base sur les équations et les paramètres du logiciel S-Risk© WAL, qui est le logiciel de référence en Wallonie depuis le 1er septembre 2017 pour la réalisation des évaluations des risques pour la santé humaine, dont la méthodologie est décrite plus en détail dans le Code Wallon de Bonnes Pratiques – Guide de Référence pour l’étude de risques – partie B évaluation des risques pour la santé humaine – version 04 (GRER, 2019), en vigueur en Wallonie depuis le 1er janvier 2019. Cependant, certains paramètres sensibles ont été affinés par le projet SANISOL pour tenir compte du scénario spécifique lié à l’activité de jardinage dont le transfert sol-plante, le taux d’ingestion de sol et de poussières, et la diète.
La recherche effectuée sur les équations et les modèles de transfert a permis :
- de trouver des modèles de transfert pour les couples métaux/plantes pré-existants dans S-Risk©, établis sur des données spécifiques à la Région wallonne, par l’intermédiaire de la base de données POLLUSOL 2 et SPAA ;
- d’étendre les modèles de transfert aux nouvelles espèces de légumes et de fruits proposées dans l’outil SANISOL, en plus des espèces pré-existantes dans S-Risk© ;
- de proposer des modèles de transfert pour le manganèse et le molybdène qui sont actuellement des polluants non normés (qui n’existent ni dans S-Risk©, ni dans le Décret Sols ).
Afin de diminuer les incertitudes existantes dans l’outil SANISOL, les valeurs de deux paramètres sensibles (quantité de terre et de poussières ingérées et diète) ont été mises à jour puis encodées dans l’outil SANISOL.
Au niveau des taux d’ingestion de terre et de poussière, la discussion a porté sur le fait de choisir entre une approche basée sur le principe de précaution au vu de l’activité spécifique de jardinage à considérer ou une approche s’éloignant de la voie conservatoire (de type "worst-case" ou "reasonably worst-case") ce qui constitue une tendance dans le milieu de l’évaluation des risques. Il a été décidé, au vu des incertitudes sur ce paramètre de moduler les taux d’ingestion en fonction de la fréquentation du jardin sur base hebdomadaire et saisonnière, avec une approche "worst-case" pour l’activité de jardinage (120 mg/j et enfant : 200 mg/j) et une approche moins conservatoire pour le restant du temps (60 mg/j chez l’enfant et de 30 mg/j chez l’adulte).
Au niveau de la diète, la discussion a porté sur le fait de choisir entre exploiter la consommation moyenne issue 14 études réalisées en Belgique ou dans les pays voisins (France, Pays-Bas) pour estimer la diète ou la recalculer à partir d’une étude belge (âge > 3 ans) et d’une étude Néerlandaise (8-12 mois). Du fait de la diversité des données issues de ces 14 études (enquêtes de consommation sur 24h, confusion entre diète et consommation moyenne), il semblait plus juste d’approcher la diète wallonne à travers un nombre limité d’études. De plus, la probabilité de surévaluer fortement les doses d’exposition liées à la consommation de fruits et légumes pour toutes les classes d’âge, mais en particulier pour les enfants semblait importante. Dès lors, l’approche basée sur le recalcul de la diète par tranche d’âge à partir de deux études détaillées a été considérée comme plus adéquate.
Délivrables
Volet 6. Gestion de la communication et réalisation d’une documentation centralisée
Dans le cadre de la subvention SANISOL, différentes actions de communication ont été menées. Trois axes de travail étaient définis.
Axe 1
La production de contenus de communication vulgarisés et la centralisation de ces informations. Différents supports ont été produits :
- Une FAQ reprenant 24 questions fréquemment posées par les jardiniers concernant la qualité des sols cultivés ;
- Plusieurs brochures relatives à la problématique du potager sur sol contaminé et à l’outil SANISOL.
Axe 2
L’accompagnement de la Ligue du Coin de Terre de Bressoux (CTB) durant l’ensemble du processus. En effet, si SANISOL a offert des opportunités au CTB, il a également chamboulé les modalités de gestion du jardin et les règles de culture, modifiant notamment leur règlement d’ordre intérieur. Ce soutien méthodologique et technique s’est formalisé par la mise en place d’une permanence téléphonique au service des jardiniers, l’animation de rencontres collectives pour présenter les avancées du projet et la structuration d’un groupe de travail pour organiser les jardiniers. Il était également question de mettre en relation la Ligue du CTB avec différents partenaires locaux.
Axe 3
Il a également été question d’accompagner la concertation, la sensibilisation, l’animation de temps de rencontre avec les acteurs locaux. Cela a consisté en la facilitation de la prise de contact avec les jardiniers pour organiser les campagnes de prélèvements des légumes, l’accompagnement de la stratégie de communication associée au déploiement du biomonitoring auprès du CTB, et la contribution aux réflexions pour l’élaboration de l’outil de recommandations en ligne.
Délivrables
- Brochure "Mon sol, mon potager et moi"
- Gestion de la communication et réalisation d’une documentation centralisée
- Brochure "Culture potagère en sol pollué ? Avec SANISOL, c'est possible"
- Liste des Questions Fréquentes par thématique
- Recommandations aux utilisateurs du Jardin Communautaire de Bressoux et à ses riverains
- Flyer "Informer sur la pollution des sols et prévenir son impact sur notre alimentation"
Partenaires du projet
SANISOL a été financé par la Wallonie et mis en œuvre par les partenaires suivants :