Les principales formations aquifères de Wallonie

 

Les réserves en eau au niveau mondial

Les stocks d'eau de notre planète sont considérables: près de 1,4 milliards de km³ soit 1,4 milliards de milliards de m³.

Figure 1 : Réserves en eaux douce sur Terre

Reserves en eaux douce sur Terre.jpg

Cependant, la majeure partie (97,5%) de cette eau est présente sous forme d'eau salée dans les mers et les océans, difficilement valorisable pour les activités humaines.

Des 2,5% restants, ce qui représente tout de même 35 millions de km³, plus des deux tiers constituent les glaciers, très peu accessibles. Le tiers restant comprend essentiellement des eaux souterraines (moins de 1% de l’eau totale du globe) et une infime partie forme les eaux de surface contenues dans les lacs d’eau douce et les rivières (soit moins de 0,01% de l’eau du globe).

Tableau 1 : Répartition des eaux douces (Km3)

Glaciers 24 000 000
Eaux souterraines 10 920 000
Lacs d'eau douce et rivières 105 000
Atmosphère 13 000


Les réserves en eau souterraine peuvent sembler importantes mais seule une très faible proportion (environ 200 000 km³, soit moins de 1%) est mobilisable et potentiellement utilisable par l'Homme. De plus, ces réserves en eau souterraine sont inégalement réparties sur la planète.

La représentation à l’échelle mondiale des ressources en eau souterraine permet de distinguer des zones caractérisées par la présence d’aquifères très productifs, et des zones relativement pauvres en terrains aquifères. Dans les régions semi-arides et arides du globe ces ressources peuvent, indépendamment de leur productivité, présenter un caractère non-renouvelable en raison de la faiblesse actuelle des précipitations.

Figure 2 : Ressources en eaux souterraines au niveau mondiale (Poster à télécharger du BGR)

Ressources en eaux souterraines au niveau mondiale.jpg
Sources : BGR, German Federal Institute for Geosciences and natural Resources, Hannovre, 2019, UNESCO.
https://www.whymap.org/whymap/EN/Maps_Data/Gwr/gwr_node_en.html

WHYMAP est un programme conjoint de l’UNESCO, la Commission de la Carte Géologique du Monde (CCGM), l’Association internationale des hydrogéologues (AIH), l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et l’Institut fédéral allemand des géosciences et des ressources naturelles (BGR). C’est un programme mondial d’évaluation et de cartographie hydrogéologique qui compile des données des eaux souterraines issues de sources nationales, régionales et mondiales. Il a été lancé en 2000. Différents produits sont mis à disposition du public dont une application webGIS gérée par le BGR (Allemagne) et l’UNESCO et ainsi que des documents pdf à télécharger.

Ressources en ligne

WHYMAP, en anglais: http://www.whymap.org/whymap/EN/Home/whymap_node.html
Application cartographique, en anglais : https://geoviewer.bgr.de/mapapps/resources/apps/whymap/index.html?lang=en&tab=whymap_gwr
Carte mondiale des ressources en eaux souterraines, en anglais : https://www.whymap.org/whymap/EN/Maps_Data/Gwr/gwr_node_en.html

En résumé

  • Les stocks d'eau du globe sont considérables mais les mers et les océans, constitués d'eau salée, représentent 97,5%. Seuls 2,5% sont des eaux douces.
  • Les 2/3 de l'eau douce constituent les glaciers, très peu accessibles.
  • Moins de 1% de l'eau totale du globe forme les eaux souterraines et moins de 0,01% les eaux de surface.
  • Une très faible proportion des eaux souterraines est mobilisable (moins de 1%).

Le cycle de l'eau en Wallonie

Figure 3 : Bilan hydrique 2008 de la Région wallonne (millions de m³)

Fig_3_Bilan hydrique 2008 de la RW.jpg

Le capital eau douce de la Wallonie est de l'ordre de 13 milliards de m³ par an.

Ce capital, la région le doit d'abord à un régime abondant et régulier des précipitations (pluie et neige) qui constituent la première phase essentielle du cycle de l'eau. En Wallonie, les précipitations sont particulièrement généreuses: elles représentent une quinzaine de milliards de m³ par an. Elles ne sont pas pour autant géographiquement uniformes. Sur le plateau des Hautes-Fagnes, il tombe annuellement 1400 mm d'eau (1400 litres par mètre carré) contre seulement la moitié à Comines, à l'autre bout de la région.

Dans l'évaluation des réserves en eau, la fréquence des précipitations joue un rôle très important. Pour la région, on enregistre, par an, une moyenne comprise entre 160 et 200 jours au cours desquels il tombe plus de 0,1 mm d'eau. Cette régularité permet, selon la nature plus ou moins favorable du sol, une plus grande infiltration efficace.

De cette eau tombée du ciel, 40 à 45% sont directement évapotranspirés. Au cours de leur infiltration, les eaux sont le plus souvent arrêtées par une couche imperméable et étanche permettant l'accumulation de réserves et leur écoulement vers la surface via des sources.

Le volume des eaux infiltrées aboutissant aux nappes souterraines varie fortement en fonction de la nature du sous-sol. Dans une région schisteuse, il est souvent négligeable alors que dans une région à sous-sol plus perméable, comme la craie, la part des précipitations rejoignant la nappe est très importante et peut représenter plus de la moitié du volume.

En Wallonie, la recharge annuelle calculée à l'aide du modèle EPIC-grid (Gembloux Agro-Bio Tech- ULg) sur la période 1995-2019 est comprise entre 1000 millions de m³ (1996) et 3000 millions de m³ (2001). La recharge moyenne, correspondant à la ressource en eau souterraine annuellement renouvelable, calculée sur cette même période, est de l'ordre de 1900 millions de m³, soit une lame d'eau moyenne annuelle de 112 mm (Bonniver et al. , 2013). Etant donné la forte variabilité de la recharge annuelle, cette valeur, caractéristique de la séquence climatique observée entre 1995 et 2019, nécessite d'être périodiquement réactualisée.

La ressource annuellement renouvelable ne doit pas être confondue avec la ressource disponible en eau souterraine, c'est-à-dire la part de la ressource annuellement renouvelable qui peut être prélevée de manière durable. Cette ressource disponible est calculée en soustrayant de la ressource renouvelable, le volume d'eau annuel réservé au maintien de la qualité écologique des eaux de surface. L'ordre de grandeur de ce volume réservé n'étant pas défini à ce jour, la valeur de référence de 550 millions de m³ assimilée à la ressource en eau souterraine disponible de la Wallonie calculée par Derycke et Fried (1982), n'a pas encore pu être révisée .

Aux précipitations tombant sur le sol wallon, il faut bien entendu ajouter l'eau entrant sur son territoire par les rivières en provenance de France, soit environ 4,5 milliards de m³ par an. Selon la même logique, les rivières wallonnes alimenteront à leur tour les régions voisines (Pays-Bas et Flandre essentiellement mais aussi Allemagne et Grand-Duché de Luxembourg).

Une large part des prélèvements effectués dans les eaux de surface (2600 millions de m³) et souterraines (370 millions de m³) retourne dans le circuit hydrologique sous forme de rejets dans les rivières (2730 millions de m³). Une fraction non négligeable, estimée à 80 millions de m³, n'est pas restituée, soit parce qu'elle est évaporée, notamment dans des processus de fabrication, soit parce qu'elle est incorporée dans des produits de l'industrie ou consommée.

Une partie de l'eau prélevée (de l'ordre de 160 millions de m³) correspond aux volumes d'eau destinée à la distribution publique d'eau potable transférés vers les régions bruxelloise et flamande.

Bibliographie :

  • Bonniver, I. et Hallet, V., 2013. Convention de Recherche d’intérêt général et pluridisciplinaire relative à l’évaluation des ressources en eau souterraine de la Wallonie. Convention SPW – Unamur.
  • Derycke, F. et Fried, J.J., 1982. Bilan des ressources en eau souterraine de la Belgique. CECA, CEE, CEEA, Bruxelles – Luxembourg, 260p.

En résumé

  • Le capital eau douce de la Wallonie est de l'ordre de 13 milliards de m³ par an.
  • Les pluies apportent 15 milliards de m³ mais 43% sont perdus par évapotranspiration.
  • Globalement, les réserves en eau souterraine, annuellement renouvelables, sont estimées à 1900 millions de m³.
  • Les volumes prélevés retournent dans le circuit hydrologique sauf une fraction évaporée ou incorporée et une fraction exportée (eau potable) vers Bruxelles et la Flandre.
  • La recharge des nappes en Wallonie est importante, pas tellement du fait des quantités de précipitations mais surtout grâce à leur régularité.

Les formations aquifères de Wallonie

Carte : Les principales formations aquifères de Wallonie

Carte_1_les principales formations aquifères de Wallonie.jpg

Le sous-sol wallon est bien pourvu de ressources en eau souterraine, même si toutes les nappes ne présentent pas des capacités d'exploitation aussi intéressantes l'une que l'autre. L'eau ne peut être stockée, et circuler, que dans les vides des massifs rocheux, que l'on désigne de façon générique par la porosité. Ces vides n'atteignent les dimensions de grandes cavités que dans le cas particulier des massifs karstiques. En fonction de l'état de la roche, on peut distinguer:

  • les nappes en roches meubles ou à porosité d'interstices: l'eau se loge dans les interstices du sous-sol. Selon la porosité, la circulation y est lente (Sables du Tertiaire) ou rapide comme dans les Graviers de la Meuse (dépôts du Quaternaire)
  • les nappes en roches cohérentes ou à porosité de fissures: la roche est imperméable à petite échelle mais est parcourue de fissures résultant de processus tectoniques. Le nombre et la largeur des fissures influencent la vitesse de circulation.

Certaines formations, en quelque sorte intermédiaires, présentent une double porosité (fissures et interstices, ex. les craies).

Enfin, divers évènements géologiques peuvent également avoir conféré à certaines formations cohérentes une porosité multiple. C'est notamment le cas des nappes de manteau d'altération (ex. dans les Massifs schisto-gréseux de l'Ardenne ou encore dans le Massif cambro-silurien du Brabant), voire des circulations karstiques qui peuvent avoir lieu dans des vides de taille plurimétrique.

En fonction de leurs caractéristiques propres, les nappes wallonnes peuvent être regroupées en 7 formations aquifères principales:

  • le socle cambro-silurien affleure en deux régions de l'Ardenne (Massifs de Rocroi et de Stavelot) ainsi qu'au nord dans le Massif du Brabant.
    Les formations sont principalement constituées de schistes, phyllades, quartzophyllades et quartzites fissurés. C'est en général là où les roches ont subi une altération naturelle ancienne (on parle de paléo-altération) que l'aquifère est le plus productif et peut dès lors être exploité. C’est le cas dans les vallées de la Dyle et de la Senne dans le Brabant, et essentiellement dans les bassins amonts de l’Amblève et de la Vesdre en Ardenne. Dans ces dernières régions, on note également, dans le socle, des venues d'eau plus profondes, carbo-gazeuses, à l'origine des sources minérales (ex. Spa).
    Au nord de la Région, la nappe du Socle cambro-silurien du Brabant est captive et partiellement en continuité hydraulique avec les cailloutis de base du Landénien et du Crétacé. La zone d’alimentation de cette nappe est située dans le bassin supérieur de la Dendre et dans le Brabant méridional.
     
  • les massifs schisto-gréseux du Dévonien présents en Ardenne, dans le synclinorium de Dinant, dans celui de Namur et dans le bassin de la Vesdre.
    Les formations schisto-gréseuses de l’Ardenne sont principalement constituées de schistes, phyllades, grès, quartzophyllades et quartzites fissurés. L’aquifère couvre une grande partie de la carte de la Wallonie, mais il possède une faible capacité et peut même s'assécher par endroit en été. Les nappes phréatiques contenues dans les couches superficielles, altérées et fissurées, sont captées par drains et par galeries. Cet aquifère est une ressource précieuse pour les régions isolées de l’Ardenne.
    Les Massifs schisto-gréseux des synclinoria de Namur, de Dinant et du bassin de la Vesdre, nettement moins étendus, prolongent au nord le Massif schisto-gréseux de l’Ardenne, et les caractéristiques de leurs nappes sont identiques.
     
  • les calcaires du Primaire regroupent les Calcaires carbonifères et dévoniens du Bord Nord et Sud du Synclinorium de Namur, du Synclinorium de Dinant et du bassin de la Vesdre.
    Les Calcaires carbonifères du bord nord du synclinorium de Namur et les Calcaires carbonifères du Tournaisis forment un aquifère qui contient une nappe qui s’étend depuis la région de Lille jusque Namur, puis se prolonge vers Visé en suivant la Meuse. C’est l’aquifère le plus important en Wallonie, il se prolonge au-delà de la frontière vers la France et la Flandre.
     
  • les formations du Secondaire Jurassique rassemblent un ensemble des roches triasiques et jurassiques constituant le sous-sol de la Gaume (Calcaires bajociens, Sables et Grès de Virton, ...). L'alternance de couches perméables (calcaires et sables gréseux) et imperméables (marnes ou sables schisteux) donne lieu à la formation de plusieurs nappes superposées plus ou moins indépendantes.
     
  • les craies du Secondaire Crétacé contiennent plusieurs nappes: celle des Craies de Hesbaye, délimitée par les vallées de la Meuse, de la Mehaigne et du Geer, celle des Craies captives du Brabant et des deux Flandres, qui se présente comme une entité isolée, celle des Craies du pays de Herve, encadrée par la Meuse et la Vesdre, celle du Crétacé indifférencié du pays de Herve, celle des Craies du Bassin de Mons, celle du Crétacé du Bassin de Paris et celle du Crétacé indifférencié du Hainaut.
    La nappe des Craies du Bassin de Mons se situe dans la dépression du Bassin de la Haine, cuvette comblée localement par plus de 300 mètres de terrains crétacés. L'aquifère est composé d'un ensemble de formations carbonatées plus ou moins perméables. C'est un aquifère majeur qui se prolonge à l'ouest au-delà de la frontière française dans le bassin de l'Escaut.
     
  • les sables du Tertiaire comprennent les Sables bruxelliens et les Sables du Landénien et de l'Yprésien. La formation des Sables bruxelliens est constituée de roches meubles (sables quartzeux, concrétions gréseuses et sables et grès calcarifères) et se situe essentiellement dans le Brabant wallon. L'eau s'y loge dans les interstices du sous-sol pour constituer la nappe. La zone d'alimentation de la nappe est très étendue (+/- 1.400 km2 dans la partie septentrionale). Le réseau hydrographique joue le rôle d'axes de drainage (Dyle, Gette et Senne).
     
  • les dépôts du Quaternaire regroupent les Talwegs de la Meuse et affluents, les Terrasses de la vallée de la Meuse, les Talwegs de l'Escaut et affluents, et les Alluvions tourbeuses de la vallée de la Haine. Des ressources en eau considérables existent dans les Graviers de la Meuse dont le Thalweg est principalement creusé dans les terrains paléozoïques. Le gisement est exploité depuis Dinant jusque Liège. L'eau se loge dans les interstices du sous-sol (limons et graviers). La nappe est en relation directe avec la Meuse.

Pour être complet, il convient de mentionner les gisements particuliers tels que les Conglomérats permiens de Malmedy ainsi que les aquifères indifférenciés tels que le Quaternaire et les terrains houillers.

Etant donné leur relative abondance et la moindre variabilité de leurs caractéristiques chimiques par rapport aux eaux de surface, les eaux souterraines représentent environ 79 % des volumes captés en Wallonie pour la distribution publique d'eau potable.

En 2021, volume total destiné à la distribution publique = 362,5 millions m3 dont :

  • eau souterraine = 289,9 millions m3 (79%)
  • eau de surface = 75,6 millions m3 (21%)

Il faut toutefois noter que de ce volume, 17,4 millions de m³ ne sont pas produits pour la distribution publique. Cette eau est rejetée vers le réseau hydrographique après avoir servi au traitement de l’eau potable, ou parce que sa qualité est insuffisante, ou encore parce qu’il s’agit d’un trop plein de réservoir.

En résumé

  • La Wallonie dispose d'importantes ressources en eau souterraine.
  • Les principales formations aquifères peuvent être caractérisées par leur nature lithologique et leur type de porosité:
    • les roches meubles, où l'eau circule plus ou moins abondamment (ex. graviers versus sables) ;
    • les roches cohérentes, imperméables à l'échelle microscopique, mais dont les fissures, permettent des flux d'eau plus ou moins importants localement (ex. grès, quartzites, calcaires) ;
  • Du fait de leur texture (ex. craies) ou d'altérations particulières (ex. manteau d'altération de l'Ardenne, karstification des calcaires) certaines roches cohérentes peuvent présenter plusieurs types de porosité superposés, et, de ce fait, devenir de ce fait localement encore plus perméables.
  • Les eaux souterraines représentent environ 79% de l'eau de distribution en Wallonie.