Cadre réglementaire
Evolution de la législation en matière d’eau potable
Le droit européen en matière de qualité de l’eau potable naît en 1980 avec la directive 80/778/CEE. Cette directive fut renforcée en 1998 par la directive 98/83/CE.
Une refonte complète de cette directive est entrée en vigueur le 12 janvier 2021 ; il s’agit de la directive 2020/2184/UE, qui constitue aujourd’hui le cadre réglementaire européen en matière d'eau potable. Elle s'applique à l'ensemble des eaux destinées à la consommation humaine, à l'exception des eaux minérales naturelles et des eaux médicinales. Elle concerne notamment les eaux fournies par le réseau public de distribution. Ainsi, l'eau potable, aux robinets des consommateurs, doit respecter dans chaque Etat membre de l'Union européenne au minimum les exigences de qualité fixées par la directive précitée.
La nouvelle directive ne se limite pas à mettre à jour les procédures et, en l’état des connaissances sanitaires, les normes visant à protéger la santé des consommateurs d’eau conformément à l’évolution des connaissances scientifiques. Son champ d’application est étendu à plusieurs domaines :
- Elle rend obligatoire l’analyse et la gestion des risques étendue à tous les dangers pouvant survenir à toutes les étapes de la chaîne d’approvisionnement en eau, depuis le captage jusqu’aux robinets des consommateurs ;
- Elle définit les critères hygiéniques concernant les matériaux en contact avec l’eau potable et fixe les bases et les principes d’évaluation de la conformité sanitaire des produits de construction admissibles pour l’eau potable. Ce processus d’harmonisation des normes relatives aux matériaux à employer pour l’eau potable sera piloté au niveau européen et ne nécessitera pas d’intervention de la Région wallonne ;
- Elle recommande des mesures générales concernant l’accès à l’eau des groupes vulnérables et de promotion de l’eau du robinet dans les espaces publics.
- Enfin, la nouvelle directive ambitionne d’évaluer les niveaux de fuites des réseaux de distribution d’eau et à terme de réduire ceux qui seront jugés excessifs.
En Belgique, la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine est une compétence régionale. La directive européenne a été transposée en droit wallon dans le Code de l’Eau dans sa partie décrétale aux articles D.180 à D.193bis, et dans sa partie réglementaire aux articles R.251bis à R.270. Le Code de l’Eau a intégré les textes réglementaires (décret et arrêtés) suivants :
- Le décret du 12.12.2002 (MB 14.01.2003 – err. 20.05.2003) – relatif à la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine
- L’arrêté du 02.10.2003 (MB 27.10.2003) – relatif à la procédure à suivre en cas de survenance d’événement portant atteinte à la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine
- L’arrêté du 15.01.2004 (MB 10.02.2004) – relatif aux valeurs paramétriques applicables aux eaux destinées à la consommation humaine
- Le décret du 20 avril 2023 modifiant le Livre II du Code de l'Environnement contenant le Code de l'Eau en ce qui concerne la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (MB 25.09.2023 erratum MB 27.11.2023)
- L’arrêté du Gouvernement wallon du 1er juin 2023 modifiant diverses dispositions en ce qui concerne l’eau destinée à la consommation humaine (MB 13.09.2023).
Contrôle et qualité des eaux de distribution
La directive 2020/2184/UE et le Code de l’Eau imposent notamment les normes de potabilité à respecter et les modalités de contrôle.
Normes en vigueur
Les eaux de distribution doivent répondre aux exigences de propreté et de salubrité (article D.183 du Code de l’Eau). Dans les faits, il s’agit de veiller à ce que l’eau potable ne contienne aucun micro-organisme, aucun parasite ou aucune autre substance constituant un danger potentiel pour la santé des personnes ; il s’agit aussi de la rendre conforme aux valeurs paramétriques (normes de potabilité) fixées à l’annexe XXXI du Code de l’Eau. L’ensemble de ces critères garantit une eau « potable ».
Les valeurs paramétriques ont été établies pour la majeure partie des paramètres, classés en trois catégories : les 2 paramètres microbiologiques, les 38 paramètres chimiques, et les 22 paramètres indicateurs (fixés à des fins de contrôle). Dans le cas plus complexe du paramètre « pesticides et leurs métabolites », une première liste de 25 molécules, révisible tous les 5 ans, a été fixée par le Gouvernement.
Il s’agit d’éléments dont on va rechercher la présence et la quantifier. Aussi, la valeur paramétrique fixe un maximum à ne pas dépasser. Qu’il s’agisse de 50 milligrammes par litre (mg/l) de nitrates ou d’une concentration mille fois plus faible (50 µg/l) de cyanures.
Ces normes doivent être respectées au point d’alimentation normalement utilisé par le consommateur à des fins alimentaires, c’est-à-dire le robinet d’eau froide de la cuisine. Toutefois, deux paramètres sont également introduits pour évaluer les risques relatifs aux installations privées de distribution : la légionelle et le plomb.
Deux types de contrôles obligatoires
- les contrôles de routine ne concernent qu’une dizaine de paramètres ; ils fournissent de manière régulière les informations sur la qualité organoleptique (couleur, odeur, saveur) et microbiologique de l’eau ainsi que les informations sur l’efficacité du traitement des eaux potables (lorsqu’une désinfection est pratiquée).
- les contrôles complets visent à vérifier la conformité de l’eau à la législation ; ils portent sur tous les paramètres légaux incluant les paramètres routiniers, les métaux, les pesticides et les hydrocarbures.
A ces contrôles obligatoires s’ajoutent les autocontrôles réalisés d’initiative par certains distributeurs pour contrôler et garantir la qualité de l’eau en tout point de leur réseau.
Obligations des distributeurs
Plusieurs obligations technico-administratives découlent des règles de transparence fixées au Code de l’Eau et incombent aux fournisseurs d’eau wallons.
Programmes de contrôle
Les distributeurs d’eau sont tenus de transmettre (pour chacune de leurs zones de distribution) au service compétent du SPW ARNE (cellule « Contrôle de l’eau » de la Direction des Eaux souterraines), un programme annuel de contrôle décrivant notamment la planification des échantillonnages prévus pour l’année suivante. La fréquence des analyses est déterminée pour chaque zone de distribution suivant la consommation journalière dans cette dernière (exemple : cinq contrôles de routine et un contrôle complet par an pour un volume produit ou distribué inférieur ou égal à 100 m3/jour). Cette obligation permet à l'administration de contrôler les fréquences et la bonne répartition des échantillonnages avant leur réalisation.
Les distributeurs doivent également communiquer au SPW ARNE tous les résultats de leurs contrôles annuels avant la fin du premier trimestre de l’année suivante. Le personnel affecté à la Direction des Eaux souterraines examine ces résultats et vérifie le respect des exigences de qualité pour les eaux délivrées aux consommateurs ainsi que la qualité des ressources en eau utilisées.
Plans d’urgence
Chaque fournisseur d’eau doit mettre en place une procédure appelée « plan interne d’urgence et d’intervention ». Le distributeur doit le soumettre pour accord à l’administration tous les trois ans, mais surtout, cette procédure doit être appliquée lors de tout événement portant atteinte à la qualité de l’eau qu’il distribue.
On définit un événement comme « tout fait altérant ou pouvant altérer la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine ». Peuvent notamment être considérés comme des événements nécessitant l’application du plan d’urgence : des résultats d’analyse inhabituels et non-conformes, un aspect, un goût ou une odeur inhabituelle, des craintes exprimées par des autorités médicales ou sanitaires, une plainte d’un abonné relative à la qualité de l’eau, etc… L’organigramme présenté ci-contre montre globalement la manière dont les problèmes de qualité doivent être gérés.
Mesures à prendre en cas de non-conformité
Lorsqu’une non-conformité de l’eau est détectée, le distributeur a le devoir d’en informer immédiatement le SPW ARNE et de déterminer la cause du problème rencontré. L’administration détermine alors le risque que présente cette non-conformité pour la santé. Dans tous les cas, le distributeur d’eau doit rétablir la qualité de l’eau dont il est responsable, sauf à démontrer que la non-conformité est imputable à l’installation privée intérieure ou à son entretien. Si l’eau distribuée présente un risque pour la santé, le distributeur prend alors toutes les mesures nécessaires pour protéger la santé des personnes : correction du problème, restriction d’utilisation, voire interruption pure et simple de l’alimentation. Dans ce cas, il doit en informer le SPW ARNE et les usagers, auxquels il doit prodiguer les conseils nécessaires.
Schéma de principe des plans d'urgence et d'intervention
En résumé
- La directive européenne 2020/2184/UE constitue le cadre réglementaire européen actuel en matière d'eau potable.
- Elle a été transposée en droit wallon dans le Code de l’Eau (articles D.180 à D.193bis, et articles R.251bis à R.270).
- Les paramètres à analyser (88 au total) sont classés en trois catégories : les paramètres microbiologiques, les paramètres chimiques et les paramètres indicateurs.
- Plusieurs obligations technico-administratives incombent aux distributeurs d’eau : établissement d’un programme annuel de contrôle, communication des résultats, établissement et application d’un plan d’urgence.