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Au ranch de gibier de Nazinga, la recherche scientifique devrait faciliter la réalisation de l’objectif d’autonomie financière du ranch tel qu’il a été clairement défini par les responsables du ranch et les autorités compétentes. Les sources essentielles de revenu du ranch demeurent : (i) la capture d’animaux vivants (très marginale), (ii) la pêche, (iii) le tourisme de vision et (iv) le tourisme cynégétique ou chasse sportive. Ce dernier poste de recettes financières constitue, au stade actuel de l’expérience acquise par le ranch, la source de revenus essentielle. A titre d’exemple, la contribution de la chasse sportive aux recettes du ranch pour la campagne 99-2000 s’élevait à plus de 67 % (rapport RGN, 99-2000). Par ces revenus financiers directs et importants que ce secteur apporte, son développement dans les zones villageoises suivi d’une redistribution en direction des villageois, est, par ailleurs, un atout irremplaçable à l’intégration des populations riveraines. Deux programmes de recherche qui seront successivement abordés ont été développés et mis en œuvre par le projet pour éclairer la problématique cynégétique du ranch. Il s’agit : de l’analyse des monitorings cynégétique et écologique d’une part, et de l’étude spécifique du buffle et du waterbuck d’autre part. Les monitorings cynégétique et écologique Ce programme, développé essentiellement de 1999 à 2000, s’articule autour des objectifs suivants :
Il a donné lieu à la rédaction et la défense d'un mémoire de DEA. La mise en œuvre a consisté en l’analyse des données quantitatives d’inventaires pédestres dans le but de dégager des tendances évolutives à partir des archives disponibles ; et en l’analyse spatiale des données permettant d’obtenir la distribution des populations, celle des tirs ainsi que celle des indices de braconnage. Ces importants travaux ont été complétés par des opérations d’inventaire. il s’agit :
Cartographie des transects permanents d'inventaire pédestre de la grande faune (156 Ko) Résultats obtenus L’analyse des monitorings écologique et cynégétique a permis d’éclairer l’historique du ranch concernant les statistiques de tir, l’évolution des effectifs des principaux ongulés, les opportunités sur les différentes méthodes de recensement, les espèces en expansion et celles qui sont peu résistantes à des prélèvements importants, l’évolution du braconnage, la re-définition des quotas, etc. De manière très concrète, les résultats ont été mis à la dispositions des autorités, gestionnaires et chercheurs. Citons quelques résultats et recommandations :
Etudes spécifiques A Nazinga les espèces d’ongulés chassables sont les suivantes : le phacochère (Phacochoerus aethiopicus), l’ourébi (Ourebia ourebi), le guib harnaché (Tragelaphus scriptus), le bubale (Alcelaphus buselaphus), l’hippotrague (Hippotragus equinus), le céphalophe de Grimm (Sylvicapra grimmia), le waterbuck (Kobus ellipsyprimnus defassa) et le buffle (Syncerus caffer brachyceros). Le cob de Buffon (Kobus kob), réintroduit, le cob redunca (Redunca redunca) et le céphalophe à flancs roux (Cephalophus rufilatus) rares, sont interdits de tir. Il sera abordé deux espèces qui symbolisent l’assiette des espèces chassables à Nazinga. Il s’agit du buffle et du waterbuck. Le premier semble souffrir d’une surexploitation par le passé ; le second, en croissance selon les dernières estimations, reste sur le plan cynégétique, encore pas assez valorisé. A Nazinga, le buffle demeure l’animal le plus prisé par les chasseurs. Il joue un rôle économique et financier de premier plan pour le ranch. Très peu d’études, malgré ce rôle financier hautement stratégique qu’il joue, lui ont été consacrées. Or, si l’on veut améliorer les recettes à Nazinga et favoriser par ce fait l’émergence d’une gestion durable, objectif tant répété et encore attendu, il faut parvenir à conquérir et à maintenir une bonne clientèle de chasseurs, par une offre régulière en safaris buffle. Par ailleurs, il faut veiller, en ce qui concerne les quotas définis, à réaliser des taux de couverture satisfaisants avec de beaux trophées. Pour atteindre de tels objectifs, la maîtrise des effectifs, de la dynamique des populations de buffles, des migrations saisonnières s’avèrent indispensables. Ces connaissances permettront de fixer des quotas écologiquement soutenables, d’améliorer les prestations de chasse afin de satisfaire une clientèle de plus en plus exigeante, tout en assurant une meilleure reproduction de l’espèce. A ce défi à relever, s'ajoute l’impérieuse et épineuse question relative au braconnage du buffle en vue de mieux évaluer l’impact socio-économique du braconnage. Les objectifs de recherche Les objectifs poursuivis sont les suivants :
Pour atteindre ces objectifs, il a été réalisé dans un premier temps une analyse des données d’inventaire et de tirs disponibles depuis les années 80. A partir d’août 2000, une nouvelle approche d’inventaire pédestre a été mise en œuvre dans l’espace RGN-SS. Ainsi, 4 inventaires totaux et spécifiques 'buffle' ont été réalisés. Cette méthode expérimentale a également été appliquée à l’éléphant (effectifs et structure du troupeau) et au waterbuck (structure du troupeau). Les effectifs de buffles observés Le dernier inventaire réalisé en mars 2002 fait état de 305 buffles recensés à Nazinga et à la Sissili Safari. Le troupeau moyen (août, 2001), pour l’ensemble des deux zones présente un effectif de 12,47 têtes. Le troupeau le plus important recensé est de 55 têtes. Au niveau de la structure, les femelles adultes restent la catégorie la mieux représentée. Le sexe – ration (males adultes : femelles adultes) est d’environ 1 mâle pour 2 femelles. C’est un indice favorable à la reproduction de l’espèce. Si les vêlages sont beaucoup plus remarqués en saison des pluies, les jeunes restent observables dans les troupeaux toute l’année. Un pic de naissance n’apparaît pas très nettement. Le braconnage du buffle A Nazinga et à la Sissili Safari, le buffle semble souffrir, comme dans la plupart des aires protégées, d’un braconnage à la fois intérieur et transfrontalier. La section de lutte anti-braconnage récemment équipée en moyens de communication efficaces produit des résultats appréciables. Des efforts restent cependant à faire. A cette démarche répressive, il convient de renforcer la stratégie en étalant la surveillance sur toute l’année, de motiver davantage les éléments chargés de ce travail par des revenus à la hauteur des efforts fournis sur le terrain ainsi qu’en privilégiant la sensibilisation dans les villages. Le braconnage n’est pas seulement un moyen d’existence socio-économique, c’est aussi un fait culturel donnant droit à un statut social encore recherché par les jeunes. L’abattage du buffle reste la porte par laquelle le jeune gourounsi s’affirme en tant que chasseur. La relance de la collaboration avec les populations riveraines récemment entamée par les responsables du ranch devrait permettre de réduire le braconnage du buffle. Conclusions et recommandations sur le buffle Au stade actuel de l’étude sur le buffle à Nazinga, on peut retenir les conclusions partielles suivantes : un important potentiel biologique existe à Nazinga. Le faible effectif constaté lors des inventaires semble être le résultat de quotas excessifs pratiqués dans le passé. Cette pratique est accompagnée d’un braconnage actif, notamment transfrontalier qui s’est développé et qui reste difficile à contrôler, malgré les patrouilles régulières organisées par la section de lutte anti-braconnage. Suite à ce constat, pour atteindre un niveau de quotas de buffles compétitif, il faudrait appliquer une gestion de redressement des populations. Cette politique semble être déjà acceptée par les responsables actuels du ranch, puisque les quotas pour la campagne 2001-2002 ont été réduits, à la suite de nos premières recommandations à 2 têtes. Les recommandations supplémentaires doivent cependant être faites :
Comme il a été souligné, contrairement aux populations de buffles où une politique de redressement des populations devrait être impérativement appliquée, les populations de waterbuck semblent être en croissance. Cornelis (2000) rapporte des effectifs de plus de 1772 têtes. Diverses raisons nous amènent à approfondire et à confirmer ces résultats avant toute proposition de gestion cynégétique plus affirmée du waterbuck :
Mise en œuvre du protocole de recherche Ce protocole aborde deux volets :
Les observations réalisées en terroirs villageois Sur 5480 ha parcourus selon la méthode des transects à largeur variable, en terroirs villageois de Sia et de Natiédougou, 199 têtes, toutes espèces confondues ont été observées. Trente et un (31) contacts avec le waterbuck dont 24 au niveau du ranch et 7 en zones villageoises pour un effectif total de 178 têtes. Le ratio mâles/femelles, à partir d’un effectif de 104 têtes est de 1 mâle pour deux femelles. 67 têtes ont été observées en zones villageoises soit 44 % des observations. Les autres espèces observées sont : bubale, guib harnaché, phacochère, ourébi, céphalophe de Grimm, hippotrague et buffle. Les grandes antilopes et les buffles ont été observés au voisinage de la Sissili safari. Dans les ZVC proprement dites, qui sont des espaces de réserve villageoise, les observations ont été peu nombreuses. Cette faible abondance serait due au manque d’eau à l’intérieur des zones villageoises de chasse. En effet, c’est à partir des rives de la Sissili Safari d’une part, et d’autre part, le barrage Akwazena que les populations de waterbucks migrent en zone villageoise. Ce mouvement balancier est influencé par la présence des cultures et de jachères où poussent des espèces fourragères recherchées par les animaux. Pour en savoir plus sur les résultats d’inventaire, consulter " Analyse préliminaire des résultats d’inventaire sur le waterbuck ". Approche des migrations saisonnières Les disponibilités alimentaires saisonnières semblent influencer fortement la migration les populations animales entre le ranch et les milieux cultivés qui ont du reste été peu étudiés. Dans un premier temps, les milieux cultivés ont été caractérisés par des relevés de végétation dans les types de pâturage existant. Il s’agit des parcelles cultivées, et des jachères de différents âges. Cette caractérisation a consisté à identifier les peuplements herbacées, à étudier les productions primaires et les principales espèces consommées selon leur stade de développement. Cette approche va se poursuivre avec une évaluation des fréquentations des champs par des waterbucks suivi d’une étude d’impact des brouts sur la production agricole. Conclusion sur le waterbuck Les études sur le waterbuck sont en cours. Les premiers résultats indiquent l’existence d’un matériel biologique important dont une partie effectue un mouvement migratoire entre le ranch et les terroirs villageois. Ces allers–retours sont influencés par la disponibilité du pâturage, mais aussi le braconnage qui sévit dans ces milieux. La présence temporaire de la faune dans ces milieux suite à l’absence de point d’eau et à l’existence d’un braconnage occasionnel réduisent les chances d’ériger ces milieux comme des unités cynégétiques à part entière. Pour l’instant, il paraît raisonnable de gérer ces espaces comme des flux temporaires dont le ranch constitue la base, en attendant d’approfondir le statut de ces milieux compte tenu de l’expérience paysanne. La sensibilisation sur le braconnage et la surveillance dans les zones villageoises devraient être poursuivies. Au stade actuel, les quotas peuvent se faire à partir des dernières estimations disponibles. Les mâles adultes resteront les trophées ciblés. |