Le facteur humain à Nazinga


  1. Introduction

  2. La promotion de la recherche sur le facteur humain

  3. L’amorce d’une recherche sur le facteur humain

  4. La valorisation expérimentale de la Zone Villageoise de Chasse de Sia

Retour vers les autres thèmes de recherche


1. Introduction

Le Ranch de Gibier de Nazinga a été dès sa conception conçu comme une entreprise de gestion de faune à caractère participatif implicite. Contrairement à d’autres espaces protégés, sa délimitation initiale avait fait l’objet d’une concertation avec les populations locales. L’emploi direct, à travers la construction des infrastructures de base, constitua, les dix premières années de fonctionnement, le principal facteur d’adhésion à l’action de conservation. Par la suite, un système de redistribution des bénéfices générés par la faune, sous la forme de Zones Villageoises de Chasse, fut initié. Ce système, novateur en Afrique occidentale, proposait une gestion du potentiel faunique périphérique au RGN par les populations elles-mêmes. A l’intérieur des Zones Villageoises de Chasse, les populations devaient accueillir, à l’image du Ranch, un tourisme cynégétique international, et valoriser ainsi leurs ressources.

Dans les années 90, ce modèle théorique trouva cependant des difficultés d’application sur le terrain. La mésentente entre les populations et l’administration s’accrut, glissant rapidement vers un conflit larvé fait de braconnage d’un côté, et de rétention du flux financier de l’autre. Cette situation révéla un autre défaut : si les premières années de fonctionnement du RGN avaient été caractérisées par une approche volontaire et intuitive de participation, aucune approche objective et scientifique ne la sous-tendait. La production scientifique de l’époque reflète d’ailleurs cet état d’esprit, tourné essentiellement vers les sciences biologiques.

Cette situation amena rapidement le projet " valorisation scientifique et technique " à développer une stratégie spécifique pour tenter d’y remédier. Depuis maintenant deux années, un expert affecté au " facteur humain " s’emploie à développer l’attention de l’administration sur ce sujet brûlant, selon trois voies principales :

 

Retour

 

2. La promotion de la recherche sur le facteur humain

La recherche sur le facteur humain est embryonnaire à Nazinga. Des efforts ont été menés pour rassembler la bibliographie portant sur les populations Nuna et Kasséna et enrichir la bibliothèque. Des sujets d’étude divers, depuis l’ethnozoologie jusqu’aux problématiques des pasteurs transhumants, ont été inscrits dans la liste des thèmes de recherche prioritaires. Les étudiants ingénieurs encadrés par le projet ont abordé des thématiques où le facteur humain est prioritaire.

 

Retour

 

3. L’amorce d’une recherche sur le facteur humain

Différents rapports attirant l’attention sur la problématique du facteur humain ont été produits, depuis le recensement de la base de Nazinga (Vermeulen, 2001), l’étude de la problématique des migrants dans le village de Sia (Vermeulen & Moreau, 2001) ou le déblayage du politique local Kasséna dans les dix villages périphériques (Vermeulen, 2002, Zougouri, 2002).

 

Enquête socio-politique dans le village de Sia

 

Retour

 

4. La valorisation expérimentale de la Zone Villageoise de Chasse de Sia

Les Zones Villageoises de Chasse (ZVC) ont été créées en périphérie du Ranch de Gibier de Nazinga (RGN) durant la période 1989-90. Dans la politique que le ranch entendait mener à cette époque (et encore actuellement) en faveur des populations locales, elles représentaient un axe fondamental, tant comme élément d’intégration des populations à la gestion de la faune que comme mode de partage des bénéfices issus de celle-ci. Le principe en était simple : le Ranch de Gibier de Nazinga et son guide de chasse recrutaient des clients chasseurs et leur proposaient différents safaris. Les actes de chasses opérés dans les Zones Villageoises de Chasses devaient générer des bénéfices rétrocédés par le Ranch aux Comités Villageois de Chasse (CVC). Taxes d’abattages et d’amodiation devaient enrichir les villageois et les encourager à la conservation de la faune. Les Zones Villageoises de Chasse servaient de même temps de " zone tampon " entre le RGN et les zones agricoles villageoises.

De 1990 à 1998, la chasse safari semble cependant avoir été concentrée à l’intérieur du ranch (cfr Doamba, 1993, Nana, 1998), à l’exclusion des ZVC. Les recettes des ZVC durant cette longue période sont maigres ou inexistantes, et les modalités de redistribution mal définies. Aucun protocole d’accord, aucun contrat liant le RGN et les CVC n’est disponible. Le statut juridique des ZVC n’est pas précisé. Certaines années, les ZVC ne semblent avoir existé que sur le papier. La saison 1999-2000 a été caractérisée par une saison de chasse fructueuse pour le ranch mais peu favorable aux Zones Villageoises de Chasse (cfr ANONYME, 2000). L’année 2000-2001 s’est caractérisée par une chasse peu développée pour le ranch, et inexistante pour les ZVC.

Le système des ZVC mis en place depuis 11 années était donc inopérant. Il entraînait un mécontentement des populations, exclues du flux financier, et partant un braconnage intensif à l’intérieur du ranch, attesté au cours des récents inventaires (Cornélis, 2000, Ouedraogo, 2000, Portier, 2001).

Dès juin 2001, le projet " Valorisation Scientifique et technique du RGN" produisait une proposition technique pour la relance de la ZVC du village de Sia (Vermeulen, 2001). Cette proposition, remaniée deux fois après consultation du RGN et des populations du village, allait aboutir à l’Avis Technique 13 Ter (Vermeulen, 2001), appelé " protocole expérimental " et annexé au contrat de chasse liant le RGN et son guide de chasse.

 

La valorisation expérimentale poursuit les objectifs suivants :

  • Restaurer la confiance des populations du village de Sia, et, partant, des autres villages ;

  • Former les populations locales à la gestion participative de la faune ;

  • Réaliser sept safaris dans la ZVC de Sia, gérés de façon participative avec les populations ;

  • Augmenter les revenus de la population de Sia ;

  • Former un agent forestier à la mise en place d’une ZVC ;

  • Aménager la ZVC de Sia.

Après une année de fonctionnement, le bilan est largement positif : l’expérience de gestion communautaire de la faune dans la Zone Villageoise de Chasse de Sia, bien que limitée dans le temps, s’avère concluante. Un sentiment d’appropriation de l’espace cynégétique et de la faune s’amorce dans le village. Une mobilisation réelle a été observée, symbolisée et concrétisée par la construction de la maison d’accueil de la Zone Villageoise. Un suivi écologique villageois, unique pour le RGN et ses environs, a été mis en place avec succès. Parti d’un contexte relationnel historiquement conflictuel, les différents partenaires ont réussi à travailler main dans la main et à regagner de la confiance mutuelle, à travers différentes activités : formation, cartographie, etc... Les safaris programmés ont été réalisés, et les recettes pour le village s’avèrent intéressantes. L’avenir s’annonce prometteur si trois conditions fondamentales restent remplies : 

  • les populations locales jouent le jeu de la conservation de leur ressources et abandonnent des pratiques de chasse assimilées à du braconnage ;

  • l’administration du RGN continue sa politique nouvelle de partage des bénéfices issus de l’exploitation de la faune ;

  • et enfin le guide de chasse choisi possède une clientèle étendue et diversifiée.

Cette expérience soulève toutefois différentes difficultés à résoudre, dont la principale est l’absence de statut juridique et fiscal pertinent pour les Zones Villageoises de Chasse au Burkina Faso. A l’issue de ce travail, nous espérons que ce document permettra aux décideurs de se faire une meilleure idée des contraintes du terrain et produiront un cadre légal adapté, faisant du Burkina Faso un modèle de la gestion des ressources fauniques dans la sous-région.

 

Pour en savoir plus :

 Vermeulen, C. (2002). La Zone Villageoise de Chasse de Sia. Une expérience de gestion communautaire de la grande faune au Ranch de Gibier de Nazinga (Burkina Faso) : Rapport année 1 (nov. 2001 – juin 2002). Rapport Scientifique, Projet de Valorisation Scientifique du Ranch de Gibier de Nazinga, MEE/DGEF/DFC/RGN, Faculté Universitaire des Sciences Agronomiques de Gembloux (FUSAGx). 28p + annexes. ( version PDF, 345 Ko)

 

Retour

Retour vers les autres thèmes de recherche