Description du phénomène

Le morcellement de la forêt, soit la dispersion de la propriété en de multiples propriétaires, est un des handicaps de la forêt européenne et wallonne en particulier.

Un morcellement trop élevé engendre de nombreux inconvénients :

  • l’impossibilité de définir une programmation et un bon étalement des coupes,
  • une difficulté à effectuer les coupes en tenant compte des vents dominants de façon à éviter les chablis (troubles de voisinage),
  • la mise sur le marché de lots trop peu importants en volume d’où l’obtention de prix plus faibles,
  • au niveau de la gestion, une part plus importante des frais fixes,
  • la difficulté de rationaliser les travaux,
  • l’impossibilité de réaliser les travaux de voirie forestière,
  • possibilités réduites de diversification des essences.

Il importe cependant de considérer séparément la forêt privée, pour laquelle le morcellement est très élevé et s’accentue, et la forêt soumise, pour laquelle la situation est beaucoup plus favorable.

Signification

Cet indicateur présente le nombre et la surface des propriétés appartenant aux propriétaires publics et aux propriétaires privés par classe de grandeur.

Les données sur les forêts soumises sont disponibles annuellement à la DGRNE (DNF).

Les données relatives aux forêts privées devraient dès que possible être disponibles à partir de l’Inventaire forestier wallon ; une étude pilote dans ce sens est en cours. Dans l’immédiat les données sont obtenues par extrapolation des données du Recensement décennal des Forêts (INS 1959 et 1970), en supposant que le morcellement a continué de la même manière qu’entre ces deux années.

Situation en Région wallonne

Nous examinerons séparément le cas de la forêt soumise et de la forêt privée.

En forêt soumise

Les forêts domaniales constituent de fait une propriété unique de la Région wallonne.

Cependant, au niveau de la gestion, chaque cantonnement a constitué une ou plusieurs entités, selon la dispersion géographique et les conditions locales. De 1980 à 1999, l’évolution est la suivante :

Tableau 3-1 : Evolution des surfaces des forêts domaniales
Source : Ministère de la Région wallonne, DGRNE.

On observe donc une augmentation lente de la surface totale et de la taille moyenne des unités (les données de 1980 ne sont pas parfaitement comparables).

En 1999, 54 % de la surface domaniale se situent dans des entités de plus de 1500 ha, tandis que moins de 4 % se situent dans des entités de moins de 100 ha.

L’évolution des classes de grandeur des propriétés dans les autres forêts soumises, essentiellement communales, est présentée à la Figure 3-17.

Figure 3-17 : Evolution des surfaces soumises par dimensions de propriétés (hors domaniales)
Source : Ministère de la Région wallonne, DGRNE.

On peut voir que la grande majorité des surfaces se situent dans des propriétés de plus de 2000 hectares.

La faible part de très petites propriétés correspond surtout à des fabriques d’églises ou des CPAS, ces propriétés provenant souvent de legs de particuliers.

En 1999, la taille moyenne des 167 propriétés communales est de 1147 hectares, celle des 58 propriétés de CPAS de 92,3 hectares, et celle des 224 fabriques d’églises de 5,2 hectares.

En forêt privée

En forêt privée, la situation est toute autre, puisque le morcellement est très élevé et s’accentue au cours du temps, le nombre de propriétés augmentant de l’ordre de 10 % tous les dix ans. Le morcellement interne aux propriétés n’est pas connu.

La Figure 3-18 reprend la répartition des surfaces par classes de grandeur des propriétés, en 1970 et en 1999.

Figure 3-18 : Surfaces privées par classes de grandeur des propriétés.
Source : Ministère de la Région wallonne, DGRNE.

En 1970, les propriétés de plus de 20 hectares représentaient 60 % des forêts privées ; elles n’en représentent plus que 50 % aujourd’hui, tout en ne correspondant qu’à 2 % du nombre de propriétaires.

70 % des propriétés ont moins d’un hectare, mais ne représentent que 10 % des surfaces totales.

Depuis 1959, la taille moyenne d’une propriété serait passée de 3,32 ha à 2,40 ha aujourd’hui.

Compte-tenu de l’augmentation des surfaces privées, le nombre de propriétaires serait passé d’environ 80.000 à près de 120.000 aujourd’hui.

Situation wallonne dans le contexte européen

La situation en Région wallonne est assez similaire à celle de l’ensemble des pays d’Europe, pour ce qui concerne la forêt privée.

Selon le rapport « Eurofor» au Parlement Européen, l’Europe (hors Suède, Finlande et Autriche) comptait plus de 10 millions de propriétaires privés possédant 60 % de la forêt, ce qui représentait une surface moyenne par propriété de 4,25 hectares.

Conclusion

Si la situation en forêt soumise est très favorable – les propriétés et les blocs qui les constituent étant à quelques exceptions près de taille suffisante pour éviter les inconvénients du morcellement évoqués plus haut – il n’en est pas de même en forêt privée, où le morcellement est extrême.

Des propriétaires ont contourné certains inconvénients par la constitution de coopératives de vente et de travaux, ou la constitution de leur propriété en société immobilière.

A l’avenir, la constitution de groupements tels qu’ils sont prévus par la Loi du 6 mai 1999 devrait contribuer à ralentir ou stopper le morcellement. Des mesures incitatives pourraient également intervenir, par exemple par le biais d’un aménagement des droits de succession sur les forêts.

 

Lien direct avec d’autres indicateurs

NatForP1 : Fonction économique de la forêt
NatForP2 : Prélèvements de bois
NatForE1 : Taux de boisement
NatForE3 : Composition de la forêt wallonne

Caractérisation des données

Pour les forêts soumises, les données proviennent des répertoires des propriétés et blocs établis annuellement par les cantonnements. Il s’agit donc de relevés exhaustifs.

Pour le privé, les données des recensements décennaux de l’Institut National de Statistique étaient obtenues par déclaration des propriétaires, sur base d’identifications par les matrices cadastrales. La précision n’est pas connue. L’extrapolation réalisée pour 1999 est dès lors très approximative, faute de mieux.

Aspects réglementaires

Le Décret du 16 février 1995 instaurant l’inventaire forestier permanent prévoyait également la possibilité d’étude sur la structure des propriétés : c’est dans ce cadre que se situe l’étude pilote citée plus haut.

En outre, a été votée le 6 mai 1999 la «Loi visant à promouvoir la création de sociétés civiles de groupements forestiers», dont l’objectif est d’enrayer le morcellement de la propriété privée.

Relation avec le PEDD

Action 100 : Réduire le morcellement
Action 101 : Revaloriser et améliorer l’exploitation forestière privée

Gestionnaire(s) des données

LAURENT Christian

Rédacteur(s)

LAURENT Christian