Recherches menées dans des CSIS
Le concept même de Cavité Souterraine d'Intérêt Scientifique implique la promotion de la recherche et la réalisation
d'études concernant les différents aspects et intérêts spécifiques des sites sous statut.
Acarien oribate supérieur de la famille des Oppiidea (Photo Microscope électronique à
balayage, X. Ducarme et M. André)
Une meilleure connaissance des sites souterrains est nécessaire pour mettre en place des mesures
de conservation adaptées et efficaces. Il faut que la gestion résultante soit spécifique à chaque site afin de
conserver en priorité les caractéristiques majeures de la cavité en question.
Pour bien des aspects (qu'ils soient biologiques, géologiques, archéologiques ou minéralogiques), les inventaires et
relevés réalisés dans les CSIS restent partiels. Par ailleurs, une seule mesure ou observation n'a généralement que peu de signification... Les
relevés dans le milieu souterrain doivent se répartir dans le temps et dans l'espace pour pouvoir saisir la diversité qui caractérise
cet écosystème.
Aujourd'hui, la gestion plus stricte et notamment le contrôle des accès aux CSIS, réduisant les problèmes de surfréquentation et de
déprédation, permettent aux chercheurs de mener dans ces cavités, des études dans de bonnes conditions. A terme, il est souhaitable que
des programmes de recherche, respectueux du milieu, se généralisent dans les CSIS pour développer une meilleure connaissance de celui-ci et
pour mieux comprendre son fonctionnement et son évolution.
Depuis que certaines cavités ont reçu le statut de CSIS, des études diverses ont pu y être réalisées. Certaines de ces
recherches ont permis d'approfondir des connaissances mais aussi d'initier des observations dans des domaines où aucune
étude n'avait été réalisée :
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inventaire et évolution des populations de chauve-souris : des relevés faunistiques concernant les chiroptères
ont été réalisés en grotte et ce depuis de très nombreuses années. Cependant, avec le statut de CSIS et les conventions "chauves-souris" financées par la Région
wallonne, ces relevés sont aujourd'hui réalisés sur base annuelle dans toute une série de cavités en Wallonie et en particulier dans celles
sous statut (voir convention Plecotus
et programme sur les Combles et Clochers);
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biodiversité des populations de micro-arthropodes des argiles en milieu souterrain : les diverses études
réalisées sous la direction de Ph. Lebrun (Unité d'écologie et de biogéographie, UCL/)
ont permis d'inventorier la faune des argiles dans une trentaine de cavités en Wallonie, dont plusieurs sont des CSIS.
Plus de 70 espèces ont ainsi pu être prélevées et diverses hypothèses
quant à la distribution de la biodiversité des acariens cavernicoles ont été vérifiées. Ces études démontrent notamment l'existence d'une
diversité d'habitats au sein d'une même cavité mais aussi un très fort effet d'insularité entre cavités (même proches).
Ces études ont par ailleurs permis de découvrir de nouvelles espèces;
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Biodiversité et conservation de la faune d'invertébrés aquatiques souterrains : dans le cadre du programme européen
PASCALIS, l'Institut Royal des Sciences Naturelles
et la CWEPSS ont prélevé systématiquement la faune aquatique souterraine dans plus de 200 stations de
référence réparties dans 4 sous-bassins hydrographiques de la Meuse. Un certain nombre de CSIS furent choisies comme sites de prélèvement. Cette étude a permis de
porter le nombre de stygobies connus en Wallonie à 40 taxons. A cette occasion, 14 espèces ont été observées pour la première fois en
Belgique. Une ou deux espèces probablement nouvelles pour la science sont en cours d'étude;
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analyse de la qualité des eaux : le karst est un système ouvert et très vulnérable aux pollutions (en
particulier les pollutions liquides) qui peuvent facilement, via les diaclases et fissures élargies, atteindre le milieu souterrain sans subir de
filtration ou d'épuration. La protection de ces sites passe donc par une surveillance de la qualité des eaux et par une gestion stricte
des points de perte et du bassin d'alimentation d'une cavité. La CWEPSS, dans le cadre des états des lieux réalisés dans
certaines CSIS, a procédé à une série d'analyse physico-chimiques des eaux courantes et stagnantes dans une vingtaine de CSIS. Ce type d'analyses
peut fournir de précieuses indications sur l'état des eaux et du milieu que l'on tente de protéger et doit être reproduit dans le temps ;
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réalisation de topographies : tout relevé et observation dans une cavité devraient être le plus précisément
positionné dans la cavité en question, non seulement pour en faciliter le suivi mais également pour différencier certains habitats/
sous-habitats au sein d'une grotte ou d'une carrière souterraine. Pour ce faire, une topographie de qualité est nécessaire. Si toutes les
grottes ayant le statut de CSIS ont fait l'objet d'une topographie (apport important des spéléos), certains de ces plans sont de qualité
médiocre et ne peuvent pas remplir cette fonction. Grâce aux membres de la CWEPSS et de clubs spéléos associés à la gestion de CSIS,
des topographies ont pu être refaites. Ce travail est loin d'être terminé et un certain nombre de sites supplémentaires
mériteraient absolument d'être revisités par des topographes;
-
recherches spéléologiques : en Wallonie, la grande majorité des cavités a été découverte suite
aux recherches et travaux de groupes spéléologiques. Par ailleurs, dans bien des CSIS, il existe encore un potentiel de découvertes
important (prolongements de certains réseaux, nouvelles salles, jonctions entre deux sites...). Ces recherches sont utiles et devraient
pouvoir se poursuivre (avec l'accord des gestionnaires des CSIS et dans le respect de la cavité). Ces prolongements peuvent fournir
des clés de compréhension aux scientifiques qui étudient les sites souterrains et les intérêts qui y sont associés. Par ailleurs, la participation
des spéléologues dans l'étude de certaines CSIS présentant des accès difficiles s'avère tout à fait
indispensable pour que les relevés, les analyses, les travaux de recherches puissent y être réalisés.
Analyse physico-chimique des eaux d'un gour dans la Grotte de Remouchamps (Photo G. Michel)