Une grande variété d'invertébrés cavernicoles

En Wallonie, la faune des invertébrés cavernicoles a été relativement bien étudiée. A côté de 310 trogloxènes et de 229 troglophiles, elle compte une cinquantaine d'espèces troglobies. Ces dernières vivent exclusivement dans le milieu souterrain et, bien que rarement spectaculaires, elles possèdent une valeur patrimoniale exceptionnelle.

Acantacyclops venustus prélevé dans les eaux souterraines de Wallonie (Photo F. Fiers - Microscope électronique à balayage)

Une proportion importante de troglobies constitue des espèces reliques, véritables "fossiles vivants" descendant de lignées aujourd'hui disparues en surface.

Les troglobies aquatiques, appelés stygobies (vivant exclusivement dans les eaux souterraines), comptent trois fois plus de représentants que les troglobies terrestres. Les crustacés constituent le groupe le plus important dans les eaux souterraines. L'amphipode Niphargus, par exemple, est un des éléments les plus répandus. Il est représenté par six espèces dans nos réseaux aquifères karstiques et nos eaux phréatiques. Le grand Niphargus virei peut dépasser 3 cm de long ! Ces crustacés amphipodes seraient d'origine marine et auraient colonisé les eaux souterraines lors des régressions marines tertiaires en passant, soit d'abord part le milieu psammique littoral puis par les eaux douces phréatiques, soit directement dans les eaux du karst côtier pour les grandes espèces.

Les recherches réalisées sur les bactéries des eaux souterraines ont confirmé que ces organismes avaient colonisé toutes les nappes d'eau même celles puisées à plusieurs centaines de mètres de profondeur! Le rôle épurateur de ces organismes unicellulaires est essentiel et son étude doit être approfondie. La compréhension de ces processus est indispensable pour pouvoir gérer et protéger à long terme les ressources en eau potable. Dans certains pays, le recours à la "bio-remédiation" en cas de pollution de la nappe utilise déjà les capacités épuratives des bactéries pour réduire "in situ" certaines pollutions.

Les troglobies terrestres sont peu diversifiés. Les plus répandus sont les collemboles, très petits insectes primitifs, dont on observe souvent les colonies à la surface de l'eau des gours ou sur les parois humides. On compte également un coléoptère psélaphide, le Tychobythinus belgicus (Jeannel) découvert en 1942 dans la grotte Lyell à Engis (commune de Flémalle), et connu uniquement de ce réseau. Etrange également cet escargot troglophile l'Oxychilus cellarius, herbivore en surface et carnivore en milieu souterrain...

De manière générale, il reste énormément à découvrir à propos de la biodiversité du milieu souterrain. A titre d'exemple, les études réalisées dans quelques grottes sur de la faune des sédiments argileux (UCL - Unité d'écologie et de biogéographie. Professeur Lebrun) ont permis de découvrir plusieurs nouvelles espèces d'acariens cavernicoles... dont certaines ne sont connues que d'un seul site jusqu'à présent!